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qui en résulterait, dans l’avenir, pour l’existence même de l’Église anglicane. Loin de se modérer, elle ne songeait qu’à profiter de sa victoire pour pousser plus avant et pour obtenir d’autres condamnations. Elle invitait ses adhérens à redoubler de vigilance à l’égard des Ritualistes, à n’épargner personne, à multiplier les plaintes, à en faire grand bruit, et elle engageait de nouvelles poursuites dans divers diocèses. Et cependant, à regarder les choses avec un peu de sang-froid, elle eût pu se convaincre à quel piètre résultat aboutissait ce grand effort de persécution. Loin d’abattre les Ritualistes, il semblait les fortifier. Sur ce point encore, je me plais à citer le sage Church dont le témoignage a d’autant plus de prix que, personnellement, il avait peu de goût pour la forme nouvelle du High-Churchism. Il écrivait, dans un article publié en avril 1871 :


La position du parti High Church est vraiment remarquable. Il a eu contre lui plus que ses rivaux ; cependant il est probablement le plus fort de tous. On dit, sans doute avec raison, que c’est le parti impopulaire. Il a été en butte aux injures et aux sarcasmes d’une grande portion de la presse. Il a été également odieux aux petits boutiquiers radicaux et aux true blue fermiers et à leurs squires. Il a été assailli par l’émeute dans les églises et censuré dans le Parlement. Les choses ont tourné contre lui, presque uniformément, devant les tribunaux. Et malheureusement on ne peut pas dire qu’il n’ait pas eu sa pleine part de folie et d’extravagance chez quelques-uns de ses membres. Cependant, c’est le parti qui a grandi, qui a attiré à sol quelques-uns de ses antagonistes, et qui a réagi sur les idées et les habitudes des autres ; ses membres se sont graduellement et comme naturellement élevés en importance et en pouvoir[1].


Pusey, tout en continuant à prendre publiquement parti pour les Ritualistes persécutés, ne laissait pas, à part lui, que d’être toujours un peu étonné, effarouché, impatienté de leurs procédés. Il eût préféré qu’au lieu de se battre sur des formes de culte, on se battît sur les doctrines que ces formes représentaient, particulièrement sur la doctrine eucharistique que paraissaient avoir en vue les adversaires aussi bien que les tenans du Ritualisme. Était-ce donc impossible ? La Church Association ne répétait-elle pas à satiété que, si elle repoussait le nouveau cérémonial, c’est qu’il impliquait, qu’il exprimait la doctrine de la présence, du sacrifice et de l’adoration eucharistiques[2] ?

  1. Occasional papers, par Church, t. II, p. 61-62.
  2. Cette affirmation se retrouve presque à chaque page des tracts publiés par cette association.