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anti-industrielle ; peu plastique et très pénible à façonner, à cuire, dangereuse même pour la santé des ouvriers, beaucoup plus coûteuse que la pâte dure, qui rivalisait avec elle depuis 1769 et finit par la supplanter en 1804.

Bien qu’il ait été maintes fois question de la ressusciter, aucun des projets formés en ce sens ne s’est jusqu’ici réalisé. Ils ont même perdu beaucoup de leur intérêt depuis la création, par MM. Vogt et Lauth, d’une nouvelle porcelaine à émail tendre, analogue à celui de la Chine et, comme lui, plus accueillant à la couleur.

Tandis que la France, vers 1700, venait d’imaginer cette « porcelaine de verre, » œuvre exquise, mais produit d’élite, voué par son prix à ne jamais franchir le seuil des foyers modestes ; tandis que, partout en Europe, chacun avait, ou croyait avoir, son secret, témoin ce Hollandais qui annonçait en 1724, dans le Mercure de France « une porcelaine de papier pour raccommoder la véritable, » un maître de forges saxon, chevauchant un jour aux environs de l’Aue, s’aperçut que sa monture s’empêtrait dans une terre pâteuse et blanchâtre. En l’examinant, il reconnut que cette substance, onctueuse au toucher, se réduisait facilement en une poussière impalpable, susceptible de remplacer avec avantage la farine d’amidon, alors utilisée pour le poudrage des perruques. Il mit son idée en pratique, et le nouveau produit, d’un ton neige immaculé, offert à bas prix, ne tarda pas à se répandre dans les principales villes de l’Allemagne du Nord.

Au même temps, un « faiseur d’or, » ancien élève en pharmacie de Berlin, nommé Bœttger, accueilli en Saxe par l’Électeur-roi de Pologne, travaillait dans un bâtiment des remparts de Dresde, nommé le « bastion de la Jeune Fille, » à la transmutation des métaux. D’une moralité douteuse, ce jeune homme de vingt-cinq ans, qui passait pour initié au Grand Art et avait eu celui de duper le roi de Prusse Frédéric-Guillaume, n’apportait peut-être pas grande conviction dans ses recherches ; mais son nouveau maître n’entendait pas raillerie et, ne voyant rien venir, s’impatientait. De sorte que Bœttger courait grand risque, si le prince poussait la chose au tragique, d’être pendu à la potence dorée, supplice réservé aux alchimistes fallacieux. La légende, — car peut-être n’est-ce qu’une légende, — veut qu’un matin Bœttger, en se coiffant, trouvât sa perruque plus lourde