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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



14 février.


Depuis la constitution du ministère Rouvier, l’extrême gauche socialiste et radicale n’a eu d’autre préoccupation que de refaire la majorité de la veille. Elle avait cru devoir en sortir après la disgrâce de M. le général Peigné et de M. le commandant Bégnicourt, mais elle entendait bien y rentrer le plus tôt possible. Elle a donc cherché une question, une réforme, au sujet de laquelle elle pourrait dicter au gouvernement des ordres que celui-ci serait disposé à accepter, et la séparation de l’Église et de l’État lui a paru parfaitement propre à servir de champ clos à un combat dont le scénario serait réglé d’avance, et qui se terminerait par une réconciliation. Il y avait d’ailleurs pour elle quelque chose de piquant à obliger plusieurs de nos ministres, au premier rang desquels figure M. le président du Conseil, à donner un démenti à leurs opinions anciennes et bien connues, pour en adopter une nouvelle qu’ils accepteraient toute faite des mains de M. Jaurès et de M. Briand. Le gouvernement s’est exécuté ; il a fait tout ce qu’on a voulu ; il a déposé un projet de loi sur la séparation ; il a accepté une interpellation sur sa politique religieuse, et enfin un ordre du jour qui a rejeté sur le Pape la responsabilité de tout le mal fait et à faire. Et c’est de tout cela que nous avons à parler, en procédant par ordre autant que possible.

L’altitude personnelle de M. Combes a quelque peu contribué aussi, il faut en convenir, à amener cette situation. Après avoir écrit à M. le Président de la République la lettre singulière que l’on sait, lettre dans laquelle il avouait que le motif de sa démission était la certitude où il était d’être mis en minorité un jour très prochain, M. Combes a tenté de se relever de cette chute en s’érigeant en arbitre du gouver-