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année 1833, Wiseraan faisait écho : il s’enflammait pour « la science et le talent » des catholiques allemands, rêvait avec Doellinger de créer une étroite union entre les clergés d’outre-Manche et d’outre-Rhin, et demandait, pour la Dublin Review, des collaborations à Munich. Doellinger, voyageant en France et en Angleterre, était fêté comme le messager d’une aurore catholique ; et Newsham, président de l’Ushaw-College, lui demandait, en 1839, de venir s’installer en Angleterre pour y représenter l’histoire de l’Eglise. On réputait au dehors la Bavière assez riche pour qu’elle pût faire des prêts aux autres nations, lors même que l’objet du prêt s’appelait Ignace Doellinger. Mais la Table Ronde, qui sans cesse acceptait de l’étranger des hôtes nouveaux, ne laissait pas émigrer ses commensaux indigènes.


X

Elle connut, aux alentours de 1840, une période de longs et beaux espoirs. Le ministère Abel gouvernait à Munich et laissait aux sympathies catholiques du roi Louis, naguère paralysées par la bureaucratie, toute liberté d’agir. Hurter, l’évêque protestant de Schaffouse, qui devait, peu de temps après, se déclarer catholique, saluait dans le règne de Louis Ier la « glorification de Dieu, » et célébrait avec enthousiasme ce roi bâtisseur d’églises. Sur les ruines qu’avait accumulées Montgelas, nombre de cloîtres se rouvraient : le livre de Brentano avait donné son fruit. Jarcke passait pour très influent auprès d’Abel ; un autre ami de Goerres, Hoefler, devenait rédacteur de la gazette officielle. Phillips et le fils de Goerres lançaient en 1838 les Feuilles historico-politiques, une revue qui dure encore ; et la Prusse prenait peur ; c’était, entre les mains du vieux Goerres, une arme de plus ; et l’arme visait la Prusse. Les Feuilles de Munich glorifiaient Droste Vischering, la victime de Frédéric-Guillaume III ; elles traquaient, jusqu’à ce qu’il démissionnât, le prince-évêque Sedlnitzky, son courtisan. Elles faisaient école : un protestant converti, Zander, ouvrait dans un journal de Wurzbourg, qu’il dirigeait, une tribune pour les doléances des Rhénans ; et le jeune Auguste Reichensperger, tout fonctionnaire prussien qu’il fût, expédiait une prose audacieuse à celle accueillante gazette. La presse des Wittelsbach devenait persécutrice des Hohenzollem : la bureaucratie prussienne proscrivait