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C’étaient, en général, des vues d’Italie, ou des paysages académiques dans lesquels l’influence de Claude était manifeste. Parvenu, plus tard, à une modeste aisance, grâce à un petit héritage que lui laissait son frère, Wilson avait senti lui-même l’insuffisance de ce fonds d’études sur lequel il vivait depuis trop longtemps sans avoir pu le renouveler, et il s’était installé à la campagne, au village de Llanberris, dans le comté de Denbigh. C’est là qu’il mourut en 1782, dans sa soixante-dixième année, et les derniers ouvrages qu’il y peignit, — on en peut voir quelques spécimens au musée de South-Kensington, — témoignent, par leurs colorations plus vives et leurs données moins conventionnelles, de l’heureuse action qu’avait eue sur son talent ce commerce plus intime avec la nature.

Contemporain de Wilson, Thomas Gainsborough devait montrer un tempérament de peintre plus original et mieux accusé, et c’est au Suffolk, son pays natal, qu’il demandait les motifs de ses paysages. Bien que ceux-ci aient été autrefois aussi appréciés que ses portraits, ces derniers surtout lui ont mérité sa célébrité. Avec un sentiment personnel de grâce et d’élégance, ils ont quelque chose de la grande tournure de ceux de Rubens et surtout de van Dyck, dont Gainsborough avait fait de nombreuses copies. Ses études peintes aux environs d’Ipswich, où il s’était établi n’avaient eu primitivement d’autre objet que de lui permettre déplacer les grandes dames dont il retraçait l’image au milieu des beaux ombrages de leurs résidences, et d’ajouter ainsi à ses œuvres le charme de ces fonds de paysage qui contrastent si heureusement avec les fraîches tonalités des carnations et des toilettes de ses modèles. Peu à peu, séduit lui-même par l’attrait de ces études et par la diversion qu’elles apportaient à la monotonie de ses travaux habituels, il leur avait consacré une plus large part de son temps. La nature cependant n’y semble vue qu’à travers les tableaux de Rubens ou de Huysmans de Malines, dont ces paysages rappellent souvent l’ordonnance et même les colorations. On assure, du reste, que sans jamais peindre hors de son atelier, Gainsborough se contentait de prendre dans la campagne quelques croquis, prestement enlevés à la plume ou au crayon, sur des papiers teintés, avec des rehauts de blanc et des couches légères à l’encre de Chine pour indiquer les valeurs principales. Si dans ses peintures ces valeurs sont, en général, bien observées, si l’assiette et la