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une tendance générale à taire une partie de la vérité, tendance qu’on peut suivre jusque dans les classes élevées de la société. Il est d’avis que la grande majorité des déclarations ne sont pas rigoureusement exactes. Les petits boutiquiers, par exemple, s’efforcent souvent de faire comprendre dans leurs frais généraux, admis à la déduction, non seulement le loyer de leur magasin et le salaire de leurs employés, mais aussi le loyer de leur habitation privée et les gages de leurs domestiques. D’autre part, M. X… a cité le cas de capitalistes qui ne font pas passer par leurs livres de comptabilité de fortes sommes déposées soit en Allemagne, soit à l’étranger. Aussi, tant qu’il n’existera pas en Prusse de droits sur les successions en ligne directe, permettant de connaître, au moins au moment de sa mort, la fortune du contribuable, les déclarations inexactes concernant les grandes et moyennes fortunes seront-elles relativement nombreuses.

« Un des effets de la loi rigoureuse du 24 juin 1891 a été le placement à l’étranger de capitaux considérables, dont les intérêts restent également hors de Prusse ou n’y rentrent que sous la dénomination de « Capitalgewachs, » augmentation de capital. Dans ce dernier cas, le capitaliste se contente de déclarer les intérêts de ces intérêts. Un autre effet de la loi a été de provoquer la sortie de Prusse d’un certain nombre de capitalistes et de rentiers, tant Allemands qu’étrangers, qui n’ont pas voulu se soumettre au paiement des différens impôts directs (impôt sur le revenu payé à l’Etat, même impôt à la ville, impôt sur le loyer, divers impôts municipaux), dont le total représente à *** environ 12 pour 100 du revenu net de chaque contribuable. Ici, la ville perçoit pour son propre compte un impôt sur le revenu équivalant à 100 pour 100 de l’impôt payé à l’Etat (autrefois 190 pour 100) ; dans certaines villes de Prusse l’impôt municipal sur le revenu est de 250 à 300 pour 100 de l’impôt dû à l’Etat. Le soussigné a lui-même reçu la visite d’étrangers voulant se soustraire à l’obligation de déclarer leur fortune entière et de payer l’impôt, et demandant quelles seraient les contributions directes qu’ils auraient à payer en France.

« Dans certains cas, dont M. X… a cité plusieurs, les commissions d’évaluation se voient cependant contraintes à faire des concessions pour prévenir la perte totale d’impôts dus par les contribuables. C’est ainsi qu’un sujet prussien se fixant en Belgique et devant, d’après la loi, payer encore pendant deux ans