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Puis, renaissez ! marqués d’une horreur si profonde
Que nul ne pourra croire en vous voyant, pareils
Sous vos anneaux rampans à quelque larve immonde,

Que c’est bien vous, joyeux, étincelans, vermeils,
Vous, plus beaux que les fleurs et que tout être au monde
Qui revenez couverts d’astres et de soleils !

Hors de cette dépouille ainsi que d’un suaire,
Vous déploierez au jour votre essor enfermé,
Et l’un de vous viendra battre ma vitre claire.

Alors dans le printemps vivace et parfumé
Saurai-je enfin de toi, céleste et funéraire !
Si là-bas tout est vain, même d’avoir aimé ?


PSYCHÉ

Elle passe sans bruit dans la maison déserte
Tenant entre ses mains une lampe qui meurt ;
Son voile safrané flotte dans la nuit verte,
Y laissant le parfum nocturne d’une fleur.

Elle passe sans bruit dans la maison de songe,
Son visage invisible est sans doute ingénu,
Et sa jambe divine, et longue et pâle, allonge,
Un pied prudent et froid sur le dallage nu.

Parfois, son beau genou brille comme la lune
Ou son ventre, entrevu sous le lin transparent ;
Ou bien, pour relever sa chevelure brune,
S’éclaire et s’arrondit un souple bras d’argent.

Sur l’étroitesse de son épaule polie,
De sa taille mouvante à son col étiré,
L’écharpe aérienne enroule ou bien replie
La spirale d’un grand coquillage nacré.