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Duc d’Aumale a pour jamais enrichi la France, avec ses compositions religieuses empreintes du sentiment le plus pénétrant, ses figures suaves et pieusement recueillies, — ces tableaux, qui ont à la fois un air calme de simplicité domestique et une si parfaite élégance, — donnent à ce brillant recueil, si bien présenté et commenté par M. Paul Durrieu, dont la critique fait autorité sur cette époque, une valeur inestimable. Cette magnifique publication fait le plus grand honneur à la maison Plon qui l’a éditée.

C’est également des origines de nos Primitifs de l’Art français, au XVe siècle, que traite M. Georges Lafenestre, conservateur des peintures et dessins au Musée du Louvre, dans la monographie si instructive et si attachante sur Jehan Fouquet[1] et son œuvre dont les lecteurs de la Revue ont eu les principaux chapitres et qu’ils retrouveront complétée dans cette élégante édition, enrichie de nombreuses gravures de choix. Le Livre d’Heures d’Etienne Chevalier, dû au peintre de Charles VII et de Louis XI, continue en quelque sorte celui des Très Riches Heures, du peintre de Charles V et du Duc de Berry, d’autant mieux qu’il semble en être inspiré, et l’on sait quels rapports l’œuvre du Tourangeau garde avec celle de Pol de Limbourg et de ses frères ou de Jacquemart de Hesdin. Dans les deux précieux manuscrits aujourd’hui réunis au Musée Condé, et désormais aussi proches à Chantilly que le furent la manière et les procédés des deux « enlumineurs, » — revivent, dans les fonds, tous les plus beaux châteaux de France, le Louvre, Vincennes, Poitiers, Lusignan.

Mais si les peintures, si nombreuses alors, ont presque toutes disparu dans la débâcle, il nous reste encore les tapisseries, les vitraux, les miniatures pour juger de la supériorité que le génie français continua de garder comme au moyen âge, et du mérite des peintres primitifs, qui s’exerçaient à la fois sous toutes les formes. Elles permettent de rendre justice à Jean Fouquet qui, à son retour d’Italie, après avoir travaillé dans le couvent de la Minerve et sous les yeux de Fra Angelico, Donatello et d’autres Florentins, revint s’établir dans sa ville natale, à Tours, qui était alors comme une nouvelle Florence, au dire du Toscan Florio, et où, dans le voisinage même de Michel Colombe, l’auteur des tombeaux de Brou et de la cathédrale de Nantes, il dirigeait un atelier florissant avec ses deux fils comme collaborateurs.

Un livre d’art d’un prix également inestimable est le Nattier[2] de

  1. Librairie de l’Art ancien et moderne.
  2. Manzi et Joyant.