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Il me serait très difficile de vous en dire mon avis en ce moment, vu que je ne suis pas bien fixé là-dessus…
Mais s’il est vrai que le gouvernement constitutionnel est celui qui veut de l’ordre et des responsabilités…
Je pense qu’il n’y aura que notre jeunesse très détraquée pour s’en réjouir…


Le candidat finit par remercier d’avance ses électeurs et par leur souhaiter d’avoir affaire à lui le jour où il sera au pouvoir.

Faiblesse et naïveté du public, cynisme, et bassesse, et ignorance, et présomption de l’orateur, tout est vivement dépeint dans cette satire très vive d’Alexandresco. Elle nous montre en même temps tout le fond railleur et pessimiste du poète. N’oublions point en effet que pendant que ses lèvres sourient ou que ses sourcils se froncent, tout le public roumain est en proie au plus bel enthousiasme, et attend des « Divans Ad Hoc » le salut de la patrie. Il nous serait difficile de trouver un autre morceau plus caractéristique et qui laisse une meilleure impression finale à nos lecteurs.

Aussi bien le dernier recueil de Grégoire Alexandresco se ferme-t-il, et il ne nous reste plus qu’à souligner les idées générales qui se dégagent de notre étude.


Cinq recueils, celui de 1832, celui de 1838, celui de 1842, celui de 1847, celui de 1863. D’un de ces recueils à l’autre, on voit l’évolution naturelle de l’esprit du poète, son développement, son émancipation, et l’on y voit, — chose curieuse et intéressante à noter ! — la personnalité du poète se préciser à mesure qu’il pense lui-même de moins en moins à sa personne. Lamartine, La Fontaine, Boileau, — un lyrique, un demi-lyrique, un classique, — occupent sa pensée et lui font subir leurs influences respectives, à des degrés différens, suivant la date de chaque recueil. Romantique au début, sous l’influence écrasante de Lamartine, qui menace d’étouffer en lui sa note personnelle, — notre poète devient de plus en plus classique, sous l’influence plus large de La Fontaine, qui lui apprend à connaître les hommes et les bêtes ; — et sous l’influence libératrice de Boileau qui lui apprend à ne plus faire attention désormais qu’aux travers et aux ridicules de la société des hommes. C’est dans l’intervalle de trente et un ans que cette évolution s’opère,