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avait abattu un flic chargé de l’arrêter, avant la guerre, mais pas malin comme gouverneur. » Et d’autres, et d’autres.

A toutes ces toiles et à tous ces dessins, il n’y a guère à corriger, et il n’y aurait guère à ajouter, de-ci de-là, qu’une touche ou un accent. Quelquefois, il est vrai, la touche serait brutale, et l’accent emporterait sans doute le morceau. Par exemple, l’ancien chef de la sûreté, M. Claude, ne parle pas de Mégy comme MM. Paul et Victor Margueritte. Il ne dit pas comme eux : « ce Mégy, pas un mauvais garçon peut-être…, » il dit tout net de lui et de son camarade Eudes : « C’étaient des assassins ! » Mais il est évident que M. Claude ne pouvait pas tenir pour une faute vénielle un coup de pistolet tiré à un « flic ! » De même, Billioray n’est pour nos romanciers historiens qu’un « peintre aigri et qui voit rouge ; » mais M. Claude se rappelle et rappelle qu’il a été condamné pour abus de confiance. De même, le colonel Chardon, était-ce le « gros chaudronnier braillard, » des frères Margueritte, devenu commandant militaire de la Préfecture de police ? Il avait eu des malheurs correctionnels et s’était vu infliger huit mois de prison : M. Claude les avait inscrits sur son carnet. Mais comme le fonds de noce et de bohème de Raoul Rigault est puissamment, quoique sobrement, rendu ! « Vieil étudiant, gamin cruel à flair de policier, Fouquier-Tinville de brasserie, » c’est bien l’homme sur le cas duquel M. Cresson dépose : « Raoul Rigault, que j’ai trouvé à la Préfecture de police dans le fauteuil de Lagrange d’où je l’ai chassé, se plaignait du manque d’argent… Raoul Rigault disait devant des agens secrets qui étaient de ses amis : « Mais il n’y a rien à faire avec ces gens-là : ils regardent à un sou. » A un plan secondaire, les orateurs favoris des cafés et des réunions publiques ne sont pas moins habilement croqués : « Léo Meillet, « Méridional véhément, » notent MM. Paul et Victor Margueritte. M. Cresson développe : « Léo Meillet ne pouvait pas avoir là (à la mairie du XIIIe arrondissement, et à cause de la personnalité du maire, M. Pernolet) une grande influence. Mais il était terrible comme acteur. Quand il allait dans les clubs, il retirait son habit, et apparaissait avec une chemise et un gilet rouge ; il tirait de ses vêtemens un drapeau rouge ; ces gestes, cette action agissaient sur les masses. » Le général Duval des frères Margueritte se suffit à lui-même ; cependant M. Choppin le complète par un détail d’hérédité : « Le père de Duval était un des