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les valeurs mobilières, c’est en raison des valeurs immobilières ‘qu’elle se trouvera établie. N’est-ce pas un contresens financier ? Ce n’est pas en raison de sa richesse mobilière que l’on choisit son loyer, c’est en raison de ses besoins, de l’étendue de sa famille, du genre de son négoce ou de sa profession.

« Quel rapport y a-t-il entre tous ces motifs et cette richesse en capitaux que la loi veut atteindre ?

« Si déjà le revenu territorial est grevé de la contribution foncière ; si le produit du travail et de l’industrie est soumis à l’impôt des patentes, pourquoi les charger encore d’une contribution nouvelle, qui n’est qu’un impôt déguisé sur les mêmes objets ? Dans la répartition d’un impôt établi d’après la valeur locative, c’est le père d’une famille nombreuse, c’est l’artisan, forcé d’habiter un quartier populeux et par conséquent fort cher, d’y louer des ateliers, des boutiques disproportionnées par leur prix à la valeur mobilière des objets qu’ils recèlent, qui seront imposés au-delà de leurs facultés. Le capitaliste millionnaire, le rentier aisé en sentiront à peine l’influence. L’impôt mobilier, établi pour atteindre les capitaux en circulation, pour frapper sur le luxe, devient, par sa nouvelle répartition, un impôt sur un besoin de première nécessité : sur l’habitation. Le véritable impôt mobilier est celui qui porte sur les objets de consommation à l’usage du riche, ou, du moins, de celui qui jouit d’une honnête aisance ; celui qui porte sur tout ce qui est l’objet ou l’instrument des valeurs mobilières, des capitaux. Cette vérité est tellement sentie que, d’une part, la loi frappe d’un droit les livres et registres de commerce, le papier des lettres de change et des obligations ; que de l’autre, elle permet aux villes populeuses de percevoir une portion de l’impôt mobilier au moyen de l’octroi. Il faut le dire franchement, cette manière diverse d’atteindre la richesse immobilière par les impôts différens, n’est qu’un charlatanisme financier. Tout impôt mis à raison de la valeur locative n’est, en dernière analyse, qu’un impôt sur la propriété bâtie. Les loyers diminuent dans la proportion que l’impôt augmente. Chacun n’a qu’une certaine somme à dépenser pour ses besoins ; il les restreint en proportion de ce que l’objet de ses besoins augmente de valeur. C’est là le véritable point de toute question d’impôt, et, en attendant que les gouvernemens aient trouvé un moyen d’augmenter l’aisance de leurs sujets en raison de l’accroissement des impôts, il faudra diminuer partout la quotité