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et d’importation sont manifestes. Depuis la construction du chemin de fer, elle a acquis un autre avantage considérable, celui d’être en communication directe avec la terre ferme. Li-Hung-Chang qui, en sa qualité de vice-roi, y résida pendant plusieurs années, fut un puissant avocat des intérêts de la ville. Non seulement elle devint bientôt un grand centre commercial, mais grâce à ses écoles normales pour l’organisation de l’armée et de la marine, elle attira d’autres élémens et introduisit des occupations différentes. En fait, Tien-tsin est devenu le foyer du parti progressiste ; des brochures, des journaux, des clubs littéraires et politiques ont propagé les idées du grand vice-roi. Ce fut Li-Hung-Chang qui fit creuser le premier puits de charbon du voisinage à Tong-Shan, il y a environ trente ans, et l’exportation du charbon fait aujourd’hui de rapides progrès : elle atteint presque 300 000 tonnes. Une autre industrie locale de grande importance est la production du sel, qui constitue un monopole du gouvernement. Il est obtenu par évaporation de l’eau de mer et empilé le long des bords de la rivière. On fabrique les spiritueux en grande quantité et on les envoie dans tout l’intérieur. Les autres exportations comprennent le vin, les fourrures, les peaux, les soies de porc et de sanglier, la laine. Le commerce d’exportation, qui n’existait pas il y a un quart de siècle, s’élève aujourd’hui à une somme d’environ quinze millions de taëls.

Depuis la première expédition européenne, en 1858, Tien-tsin a été le théâtre de bien des luttes, de bien des combats désespérés. La dernière révolte n’a fait rage nulle part avec plus de furie qu’ici, et c’est là que les Boxers ont incendié au commencement de juin 1900 les missions étrangères. D’abord personne ne sembla se rendre compte du danger imminent. Ce fut seulement dans la seconde moitié du même mois, après le premier bombardement de Takou, que les hostilités commencèrent, avec toutes les horreurs de la guerre. L’attaque de la colonie européenne, le blocus des casernes, la destruction de la station du chemin de fer et le massacre des missionnaires et des chrétiens se succédèrent rapidement. Les descriptions des témoins oculaires nous montrent toutes les atrocités commises durant l’insurrection. La bravoure des troupes et des missionnaires, des femmes même et des enfans, excita l’admiration du monde entier. Il reste encore beaucoup de ruines, disséminées çà et là, qui attestent le long siège.