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Si jà comme un César concevoir l’univers,
Vous a fait oublier le chantre de ces vers,
Roi, dont l’honneur ne peut s’amoindrir ni s’accroître,
Sans vous dire son nom vous pouvez le connoître.
[ Le Bocage Royal, édition de 1587, t. IV, p. 10.]


Il lui rappelle alors qu’en des jours troublés et douteux, au temps de Jarnac et de Moncontour, 1569, lui seul eut le courage d’emboucher en son honneur la trompette héroïque, et de célébrer la victoire du prince ; — et ce fut le bel hymne qui figure au premier livre des Hymnes :


Tel qu’un petit aigle sort
Fier et fort,
Dessous l’aile de sa mère,
Et d’ongles crochus et longs
Aux dragons
Fait guerre sortant de l’aire.
Tel, aux dépens de vos dos,
Huguenots,
Sentîtes ce jeune prince,
Fils de roi, frère de Roi,
Dont la foi
Mérite une autre province.
[Édition de 1587, t. VII, p. 133.]


Mais il y avait six ans de cela ; et en vain le poète y mit-il une insistance qu’on regrette un peu pour sa dignité ! en vain proposa-t-il au Roi de recommencer contre leurs ennemis une campagne comme celle des Discours des Misères de ce temps !


J’ai trop longtemps suivi le métier héroïque,
Lyrique, élégiaq’, je serai satirique…
S’il y a quelque brave ou mutin oui se fâche ;
Si un plus qu’il ne doit veut monter en crédit ;
Si quelque viloteur aux princes devisant
Contrefait le bouffon, le fat, ou le plaisant ;
Si nos Prélats de cour ne vont à leurs Églises ;
Si quelque trafiqueur qui vit de marchandises,
Veut gouverner l’État…
Si plus, quelque valet de quelque bas métier
Veut par force acquérir tous les biens d’un quartier ;