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contre la concurrence étrangère les navires qui lui sont destinés. Mais, dans les mers ouvertes, la part des chantiers de construction russes ne dépasse pas 17 pour 100, quant au nombre des navires, et 2 pour 100 quant à leur tonnage. Ce dernier chiffre indique que les navires construits en Russie sont d’un tonnage très faible, la plupart du temps de simples remorqueurs. Il en est des machines exactement comme des coques : sauf dans la Caspienne, où les machines de construction russe sont en plus forte proportion qu’ailleurs, la part de l’industrie locale n’est que de 22,5 pour 100 dans la construction des machines motrices des navires.

La grande majorité des vapeurs russes est donc de provenance étrangère. Les pays qui les ont fournis sont l’Angleterre, la Suède, l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie. Les quinze bateaux actuellement en service de la Flotte volontaire sont tous de construction anglaise. On se souvient que les trois premiers avaient été acquis en Allemagne ; dans la suite, la commande d’un navire avait été donnée aux Forges et Chantiers de la Méditerranée. C’est également en Angleterre qu’ont été construits les trois plus beaux paquebots de la Compagnie russe de navigation et de commerce, le Tchikatcheff, l’Empereur-Nicolas II, et la Reine-Olga. C’est de constructeurs ou d’armateurs anglais, allemands et autrichiens que la Compagnie de l’Est-Chinois a acquis les navires nécessaires à l’organisation de son service maritime. « Les industriels allemands, écrit M. Charlat dans son rapport sur le commerce de la Russie en 1901, travaillent avec persévérance et méthode à devenir les fournisseurs de la marine marchande russe. En deux ans, la maison de constructions navales Klawitter et Cie de Dantzig est parvenue à recevoir pour 2 500 000 francs environ de commandes, tant en steamers de grand tonnage qu’en remorqueurs, ainsi qu’en dragues. » De même que les coques, les machines proviennent aussi d’Angleterre et d’Allemagne. Quant à la France, sa part est nulle : à l’exception du paquebot livré par les Forges et Chantiers à la Flotte volontaire, nous n’avons pas connaissance d’un seul navire fourni par un chantier français à la marine de commerce russe. Pourquoi cet ostracisme ? Est-ce parce que nos chantiers ont la réputation de construire plus chèrement et plus lentement que leurs concurrens étrangers, ou parce que nous ne possédons pas, comme en Angleterre, un marché de navires ? Quoi qu’il en soit, le développement que le gouvernement russe semble disposé à donner