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despotisme législatif, il a été déprimant. Il a nié l’efficacité de l’effort, pour affirmer celle des expédiens.

« Le socialisme n’a vu que des rouages, un mécanisme grossier dans ce qui est hyperorganique. Non seulement, il n’a apporté aucune solution à la crise morale, mais il n’a même pas su voir la gravité de cette crise. C’est de là que découle son impuissance incurable de reconstitution. »

La même réprobation du socialisme matérialiste ou matérialisateur a retenti souvent dans cette Revue rédigée par un athée. Reproduisons encore les lignes suivantes, de juillet 1898, qui expriment avec éloquence les inquiétudes, les angoisses, les besoins de l’âme humaine :

« Le néo-socialisme est resté en dehors de ce débat. Aux aspirations ignorées de notre âme, aux inquiétudes nobles de ce temps, au scepticisme, au doute, au dilettantisme, au pessimisme etc., il n’a répondu que par la promesse du pain quotidien. N’est-ce pas à en pleurer ? Quoi ! c’est à ce desideratum qu’ont abouti des siècles et des siècles d’efforts et de génie !

« Le néo-socialisme ne peut que donner un alimenta la désespérance, car c’est précisément sur la vanité des satisfactions physiologiques que repose tout le pessimisme. Le récent suicide de la grande socialiste anglaise, Mme Eleonor Aveling, la fille même de Karl Marx, nous montre par le fait l’incapacité du socialisme à prendre la direction des âmes. La méthodologie du socialisme n’existe pas, sa psychologie est nulle, sa philosophie est puérile, sa sociologie, en un mot, est insuffisante.

«… Le socialisme n’a pas compris l’homme… Il a été l’expression plus ou moins exacte d’un moment ou d’une catégorie. Il n’est pas l’idéal propulseur. »

Après six années, pendant lesquelles M. Deherme n’a vécu, en somme, que pour l’Université populaire, il constate que le résultat de l’entreprise est « pitoyable. » La zizanie a pénétré parmi les associés. Le goût des distractions l’a emporté sur l’attrait des études. Des comités rivaux se sont formés. L’œuvre éducatrice a vu surgir en son sein l’arbitraire et incohérente suprématie du nombre, le seul dogme, semble-t-il, que la mentalité moderne veuille et puisse conserver.


S’il y a cependant pour la vérité, pour la justice, pour la morale, pour la liberté, une autre source et un autre garant que le