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répondit la création d’un service régulier entre Odessa et New-York, avec escales à Constantza, le Pirée, Naples et Gibraltar. On espérait probablement enlever aux Compagnies françaises et italiennes le transport des émigrans de Roumanie, de Grèce et d’Italie en Amérique. Trois vapeurs devaient être affectés à ce service, à partir de l’automne dernier.

La Flotte volontaire n’a pas tardé à s’apercevoir qu’il est difficile, pour des navires, de concilier les conditions nécessaires au service de croiseurs auxiliaires en temps de guerre, avec celles qu’exige un service commercial en temps de paix. Pour être apte au service de croiseur auxiliaire, un navire doit pouvoir fournir une vitesse considérable. Or, en temps de paix, dans le service commercial, un paquebot rapide est d’un entretien fort coûteux et d’un rapport assez mince. Pour que l’exploitation en soit rémunératrice, il faut que les passagers de luxe soient plus nombreux que les passagers de pont, les soldats et les émigrans, et c’est généralement l’inverse qui se produit.

Obligée par ses règlemens de posséder des navires capables de fournir de grandes vitesses, la Flotte volontaire décida cependant de se contenter, pour ses paquebots, d’une vitesse maxima de 18 nœuds dans le service de guerre et de 13 nœuds dans le service commercial. Malgré la limite ainsi fixée à la vitesse, elle continua à se ressentir des exigences exceptionnelles auxquelles elle était soumise. En 1902, le ministère de la Marine, jugeant ses moyens insuffisans, lui imposa la construction de quatre nouveaux navires à grande vitesse, pour porter à six le nombre de ses unités rapides. La direction prit le parti d’acquérir des vaisseaux construits en vue des besoins commerciaux, pour compenser les pertes causées par les navires construits en vue des besoins de la guerre ; elle posséda ainsi deux types de navires : les premiers du type « transport, » les deuxièmes du type « croiseur. » Cette mesure fut encore insuffisante : la flotte volontaire en fut réduite à retirer du service actif quatre de ses vaisseaux à grande vitesse, et à les placer en réserve à Sébastopol et à Odessa, prêts à reprendre la mer à la première réquisition. C’est dans ce double rôle, commercial et militaire, joué alternativement par la Flotte volontaire, que consiste la grande difficulté contre laquelle elle s’est débattue. Son origine, les circonstances qui ont présidé à sa fondation, son caractère officiel et la dépendance où elle se trouve vis-à-vis du gouvernement l’ont