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envergure. Cette absence de facilités auxquelles nous nous sommes habitués, et sans lesquelles nous ne comprenons pas l’existence journalière, était particulièrement sensible dans les heures de crise, de méfiance, lorsque les capitaux se cachaient et qu’on faisait rentrer les créances. La Révolution de 1848 amena des perturbations politiques, qui eurent leur répercussion, dans presque tous les pays, sur le développement normal des affaires. Presque partout le gouvernement intervint pour apporter des soulagemens et des remèdes : en France, il aida à la fondation de comptoirs d’escompte. En Prusse nous avons vu les mesures que Hansemann, durant son ministère assez court, fit prendre, notamment la création de caisses de prêts, l’émission de bons garantis par des nantissemens. En Belgique, une tentative originale, qui s’appuyait sur l’initiative privée et l’association, avait été faite sous le patronage du roi Léopold, en 1848 : du moins, à cette époque, la fondation d’une société de crédit mutuel avait paru une nouveauté. L’objet de l’association était de procurer aux participans, qui étaient pour la plupart des petits commerçans et des artisans, un crédit plus considérable et dans de meilleures conditions qu’ils ne l’auraient obtenu individuellement : la Société de crédit bruxelloise escomptait des effets de chaque membre jusqu’à concurrence du montant d’actions qu’il avait souscrit. Elle trouva un concours empressé et bienveillant auprès des banques et des banquiers belges. L’attention de David Hansemann avait été attirée sur la nouvelle institution que son beau-frère Weise décrivit dans une brochure. Il en entrevit toute l’utilité pour Berlin, qui était mal pourvu dans cet ordre d’idées, et il conçut un projet qui assurait la coopération de la Banque de Prusse ; celle-ci aurait pris le papier de l’association de crédit à un taux de faveur. Lorsqu’il fut mis à la tête de la Banque de Prusse, il commença une véritable propagande, allant voir lui-même beaucoup de commerçans et d’industriels. En 1850, il publia l’exposé du plan d’une société de crédit, et peu de temps après, il convoqua une réunion de 300 membres qui se tint au siège même de la Banque de Prusse et qui approuva les statuts élaborés par lui. Il ne s’agissait pas de faire concurrence aux banquiers particuliers ; la nouvelle institution se bornerait à escompter le papier de ses membres et à recevoir des dépôts, sur lesquels elle bonifierait un intérêt modéré, elle s’abstiendrait de toute opération pouvant entraîner des risques. Elle aurait à sa tête