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dissiper définitivement l’équivoque, inutile désormais. « Quant aux bases de M. de Saint-Aignan, rapporte Stadion, nous refusâmes positivement de les admettre, et nous déclarâmes que s’il (Caulaincourt) voulait y persister ou baser le contre-projet sur elles, cela ne pourrait être regardé que comme un refus. Les ministres anglais mirent surtout beaucoup d’attention à rejeter les pièces de Francfort, comme étant officiellement inconnues à eux et tout à fait étrangères aux négociations de Châtillon. » Ces feintes ouvertures n’étaient donc pas, comme on se plaisait à le croire en France, un point d’arrêt dans la guerre et dans la négociation, une époque, en quelque sorte, où le cours des choses aurait pu changer : elles furent un épisode, qui ne suspendit rien, n’arrêta rien et s’écoula comme le reste, selon le cours de la guerre. Or la guerre tourna définitivement contre Napoléon. Le Congrès fut rompu le 18 mars.


V

II ne reste plus qu’à donner l’épilogue. Il se joua, au mois de mai, à Paris. Napoléon ayant abdiqué, le Sénat ayant déclaré la déchéance de la dynastie impériale, Louis XVIII étant remonté sur le trône et Talleyrand rentré aux Affaires étrangères comme ministre du Roi, il ne s’agissait plus de « cette prépondérance que, pour le malheur de l’Europe et de la France, l’empereur Napoléon avait trop longtemps exercée hors des limites de son empire. » Le Roi et son ministre se crurent en droit de réclamer l’exécution des promesses de Francfort. Ils invoquèrent la déclaration officielle du 1er décembre :


Les Puissances alliées ne font point la guerre à la France, mais à cette prépondérance…

Les Puissances confirment à l’Empire français une étendue de territoire que n’a jamais connue la France sous ses rois…


Ils invoquèrent également la déclaration du 25 mars 1814 : « Les puissances s’étaient offertes à discuter, dans un esprit de conciliation, ses vœux (de la France) sur des objets de possession d’une mutuelle convenance, qui dépasseraient les limites de la France, avant les guerres de la Révolution. » Talleyrand en prit acte au nom du Roi. Il renouvela les argumens de Caulaincourt à Châtillon. Les alliés l’écoutèrent avec plus de courtoisie