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lui fut présenté le 27 janvier 1814. Metternich rappela les stipulations de Tœplitz : « Le refoulement de la puissance française dans des bornes compatibles avec un système d’équilibre en Europe… Pour atteindre ce but, les puissances ont jugé nécessaires :… la rentrée de la France dans les limites du Rhin, des Alpes et des Pyrénées, le Rhin et les Alpes offrant des lignes à déterminer. » Voilà le secret de Francfort qui s’échappe. C ; est que les alliés sont en France, Napoléon en retraite, Paris menacé, et qu’il n’importe plus de feindre. Ils sont en mesure de déclarer ce qu’ils ont toujours voulu et de l’imposer. « Napoléon, poursuit Metternich, a envoyé à Châtillon un plénipotentiaire, Caulaincourt, pour négocier la paix. Acceptera-t-il la négociation sur ces bases ? On le saura bientôt, si l’on veut entrer en conférence. » François en fut d’avis. Alexandre ne le désirait pas ; son idée arrêtée demeurant « de marcher sur Paris et de détruire Napoléon. » Il ne consentit que pour la forme, se réservant de rompre les négociations dès qu’elles seraient entamées. Revenant aux pourparlers de Prague, Tœplitz, Francfort, il en fit, par un de ces ministres, définir le caractère et l’esprit : « Les alliés ont dû circonscrire leurs prétentions à la nature de la situation ; mais ces termes ne sont pas une renonciation à tous les autres avantages auxquels la Providence et les sacrifices immenses que les puissances ont déjà faits leur permettent d’aspirer. Les bases dont on a parlé, d’une manière non officielle, à Francfort ne sont pas celles auxquelles on voudrait se tenir strictement aujourd’hui… Aucune transaction antérieure entre les alliés ne les oblige nullement envers leurs ennemis[1]… »

Les ministres se réunirent, le 29 janvier, et décidèrent l’envoi de plénipotentiaires à Châtillon afin d’ouvrir « des conférences préliminaires à la paix générale. » Castlereagh avait fort à cœur de corriger l’espèce d’aveu tacite donné par Aberdeen aux « limites naturelles » à Francfort ; il fit arrêter que l’on proposerait à la France les limites de 1792, comme base de la paix, « sauf à entrer dans des détails d’arrangement d’une convenance réciproque sur quelques portions de territoire, au-delà des limites, de part et d’autre. » Ces mots furent ajoutés sur la demande de Metternich, on verra comment il les entendait. Ils lui

  1. Note russe du 28 janvier 1814.