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LES ALLIÉS ET LA PAIX
EN 1813

I
LE TRAITÉ DE KALISCH

Il n’y a pas dans l’histoire de l’Empire de point sur lequel on ait plus disputé que les négociations de 1813. L’histoire coutumière, celle qui n’est prouvée nulle part et que tout le monde professe, veut que Napoléon ait refusé par deux fois la paix, la première, à Prague, dans des conditions très belles : la ligne du Rhin, la Hollande, la Belgique, la Westphalie, le Piémont, la Lombardie, la Toscane, Rome, ce qui semble impardonnable ; et l’autre, dans des conditions belles encore, à Francfort : les limites naturelles, le Rhin de Bâle à la Hollande, les Alpes et les Pyrénées, ce que l’on déplore, à juste titre. Il aurait, par ambition pure, par orgueil de jouer le Charlemagne et, comme on dit maintenant, par hypertrophie d’impérialisme, méconnu les intentions des alliés et les « admirables conseils » du plus sage des conseillers et du plus clairvoyant des amis, Metternich. Lorsque l’on met d’un côté, dans la balance la magnanimité d’Alexandre, les principes et la loyauté de François II, la sincérité de Metternich, les vertus du roi de Prusse, dignes de ses malheurs, la modération des Anglais, empressés de revenir à la paix d’Amiens, rompue, malgré leurs vœux, qu’on y ajoute le désir, très naturel d’un bon Français de voir son pays pacifié dans les magnifiques conquêtes de 1795 et de 1801, enfin cette superstition des détracteurs même les plus acharnés de Napoléon que tout lui a