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groupes de forces paraissent avoir été dans le même cas et avoir donné des produits dont la signification est infiniment moins malaisée à apercevoir.

Au début, et pendant fort longtemps, notre globe fut exclusivement composé de matériaux fluides : c’étaient surtout des gaz et des vapeurs, peut-être des liquides, mais on peut facilement concevoir un moment où rien de solide n’existait dans l’architecture terrestre. Les progrès du refroidissement spontané de la masse planétaire amenèrent pourtant certains élémens à franchir la limite de l’état solide, et subitement une foule de forces réglées par des lois strictes et qui étaient sans emploi sur la terre entrèrent en jeu. Ce sont les forces que nous pouvons, pour simplifier, qualifier du nom de cristallogéniques et qui président à l’arrangement des molécules dans les édifices minéraux. On ne peut imaginer que ces forces n’étaient pas en puissance dans le monde, car elles avaient eu déjà à s’exercer dans maints milieux astronomiques et, au plus près, sur Mars, qui, plus âgé que notre terre, devait jouir avant elle de la possession de l’état solide.

D’ailleurs, les lois qui entrèrent en jeu au commencement de l’installation des matières non fluides, ne sont que quelques-unes parmi plusieurs, car nous savons que diverses catégories seulement de minéraux purent alors prendre naissance. Ce sont vraisemblablement des composés résultant de la réaction mutuelle de vapeurs à haute température qu’on est autorisé à regarder comme les constituans de la coque primitive du globe. Plus tard s’élaborèrent les substances dites de la voie sèche et qu’on imite dans les laboratoires en fondant des matières au feu. C’est plus tard encore, quand certaines régions de la croûte devenue enfin très épaisse réunirent des conditions favorables, que se constituèrent des minéraux du genre de ceux que nous trouvons dans les filons et dans les roches métamorphiques et qui se reproduisent exactement dans l’eau surchauffée. Enfin, il fallut attendre que des localités en fussent arrivées, par les progrès du refroidissement, à n’avoir plus que les températures qui nous conviennent à nous-mêmes pour que devînt possible l’élaboration d’une foule de corps que nous imitons par la méthode appelée voie aqueuse, parce que l’eau, non échauffée et à la pression ordinaire intervient nécessairement dans, leur reproduction.