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le prix du fer s’était relevé de son niveau le plus bas et permettait à un certain nombre de hauts fourneaux, éteints depuis 1900, de se rallumer. Ce mouvement ne semble que partiellement enrayé par les événemens politiques et militaires qui marquent l’année 1904 : les commandes de la Guerre et de la Marine ne manqueront pas d’affluer ; seule, la consommation courante se ralentit.

Les richesses de l’Oural et du Donetz en minerais de fer sont telles que le pays se suffit à lui-même ; le charbon existe en quantités extrêmement considérables dans cette dernière région. Le naphte de Bakou fournit dans le bassin du Volga un combustible apprécié. On connaît des gisemens houillers importans sur divers points de la Sibérie, où se trouvent aussi des dépôts notables de métaux précieux, d’or en particulier. Les divers élémens qui peuvent servir de base à une industrie puissante sont donc réunis en Russie ; mais les distances sont énormes et le réseau des voies ferrées, bien que dépassant déjà 60 000 kilomètres, a besoin d’être encore très développé ; de ce chef seul, des commandes sont en réserve pour de longues années. Les rails, les wagons, les locomotives devront être fournis en quantités dont il est malaisé de prévoir la somme.

Si la guerre est un obstacle au plein essor du mouvement industriel qui se dessinait nettement, elle ne fait que le retarder : aussitôt la paix conclue, nous le verrons sans doute reprendre avec une vigueur nouvelle. Il y aura évidemment une note très lourde à payer : les frais directs de cette campagne, qui se poursuit à 10 ou 12 000 kilomètres du cœur du pays, ne peuvent guère s’élever à moins de 160 millions de francs par mois. Si la guerre devait durer deux ans, cela ferait déjà près de 4 milliards de francs. Il y aura ensuite d’autres dépenses à prévoir pour la réfection de la flotte, du matériel de guerre les constructions de voies ferrées, les doublemens des lignes existantes, comme celui du Transsibérien. Plusieurs milliards vont s’ajouter à la dette russe et en porteront le capital au-delà de 20 milliards de francs. Nos alliés sont de taille à porter ce fardeau, mais il n’en pèsera pas moins sur eux, et il faudra que le développement économique du pays soit encouragé de toutes les façons par le gouvernement, pour que la nation ne se ressente pas trop vivement de ces charges accrues.

De l’autre côté, l’outillage économique est moins avancé que