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Ainsi la communication existe et, sans rompre charge depuis M’Bourao, le chaland a pu flotter, le 29 octobre, sur le cours du grand tributaire du Chari. Par cette voie libre et facile que le lieutenant Kieffer a fort bien décrite, le bateau sorti des ateliers de Bezons, mis à flot dans le bas Niger, remorqué sur la Bénoué et livré à ses propres moyens sur le Kabi-Toubouri, vint s’amarrer à Fort-Lamy le 4 novembre 1903, cent douze jours après le départ de Bordeaux. De ce chiffre, si l’on défalque trente-quatre jours perdus, il reste exactement deux mois et demi de route pour relier par cette voie nouvelle les côtes de France aux rives du Tchad.

Le problème posé par Barth est enfin résolu. La mission Niger-Bénoué-Tchad a justifié son nom et prouvé par une expérience concluante l’existence d’une voie fluviale déversant, pendant la période des hautes eaux, le trop-plein du Logone par une vallée d’écoulement dans le bassin du Niger.

Réconfortés par le chaleureux accueil de leurs camarades du Chari, remis de leurs fatigues par un repos de quinze jours, les explorateurs profitèrent de leur présence dans la région du Tchad pour compléter leur enquête.

Tandis que M. Delevoye, chargé de déterminations astronomiques, fait avec le Benoît-Garnier le tour des eaux libres du lac pour atteindre son bord septentrional et relier ainsi le IIIe Territoire militaire de l’Afrique occidentale française à nos postes du bas Chari, le capitaine Lenfant, secondé par M. Lahure, se rend par le nord du Cameroun dans le Bornou ; puis, cette reconnaissance terminée, il envoie son collaborateur sur la rive orientale du lac et revient à Fort-Lamy pour préparer le retour. La mission se remet en marche le 7 janvier 1904 et opère au début par deux voies différentes. M. Delevoye remonte aux basses eaux le Logone avec une baleinière substituée au Benoît-Garnier que le capitaine a cédé à nos troupes du Tchad ; il atteint ainsi le 10e parallèle. Poursuivant 9a route, tantôt à pied, tantôt en pirogue, il longe la rive sud du Toubouri, traverse un gué près de M’Bourao et se dirige au nord du Mayo-Kabi. Pendant ce temps MM. Lenfant et Lahure, partis de Karnak-Logone, font route au sud-ouest et franchissent une zone d’inondation extrêmement pénible avant d’atteindre les pays d’influence peuhle. Le 25 janvier, les deux fractions de la mission se retrouvent à Binndéré, où M. Delevoye stationne pour en prendre les coordonnées. Ce travail se répète à Léré et à Biparé. Le 1er février, les voyageurs arrivent, non sans difficulté, à Garoua ; le 16, ils quittent Yola sur des chalands pour