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dit que cette solution une fois adoptée ne puisse et ne doive être maintenue et préférée et que la marche sûre et régulière de l’exploitation ne la fasse considérer comme très suffisante et ne donne toutes les satisfactions désirables. Elle ne présente en effet aucun des désagrémens et des inconvéniens d’une traversée souterraine ; elle ne modifie en rien les conditions de la navigation, qui resterait libre de tous ses mouvemens sur la largeur du détroit ; elle ne peut éveiller aucune susceptibilité de la part de la marine ; elle laisse parfaitement intacte la situation insulaire de la Grande-Bretagne. La solution du pont immergé répond donc d’une manière satisfaisante à toutes les critiques, à toutes les objections qu’avaient soulevées les solutions précédentes.

D’après les évaluations qui ont été faites, trois chariots en service simultané et ne fonctionnant même que le jour suffiraient très probablement pour effectuer un transit de 3 millions de tonnes et de 2 millions de voyageurs. C’est pour le moment tout ce que l’on peut et doit raisonnablement prévoir. La solution d’attente pourrait donc très bien ne pas être seulement un expédient, mais une solution définitive. Nous avons vu d’ailleurs qu’elle pouvait être aussi un auxiliaire précieux pour la construction, la doublure en quelque sorte d’un ouvrage grandiose, si plus tard on en reconnaissait la nécessité.


VI

On a pu faire cependant une objection assez grave à cet ouvrage métallique de près de 35 kilomètres de longueur. Cette objection est sa durée, impossible à préciser, mais certainement limitée, puisque l’eau de mer l’altérera nécessairement et qu’il sera très difficile, pour ne pas dire à peu près impossible, d’en renouveler les peintures et les enduits.

Mais les ingénieurs ne sont jamais à court de répliques et d’expédiens. Et tout d’abord ils font observer que rien ne peut ni ne doit durer indéfiniment ; et des accidens malheureux, mais assez rares pourtant, sont là en effet pour nous rappeler que toutes les prévisions et tous les calculs de la science sont quelquefois déjoués. En ce qui concerne, cependant, la conservation d’un ouvrage métallique immergé dans l’eau de mer, ils affirment qu’on peut être assuré, en se fondant sur des études récentes dont la valeur technique ne saurait être contestée, qu’un