Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 21.djvu/58

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LES
TRANSFORMATIONS DU MAROC

LE MAKHZEN

Il n’est point d’expression, dont on use plus souvent que le terme de « makhzen, » en traitant des choses marocaines ; il n’en est aucune dont on ignore davantage le sens exact. On sait que le makhzen est le gouvernement du Maroc : en quoi consiste ce gouvernement, quel est son véritable caractère, autant de points restés obscurs, car jusqu’ici très peu d’Européens ont été mis en mesure d’observer le fonctionnement de l’Etat chérifien. Le hasard d’un long séjour à Fez m’a permis d’étudier de très près l’institution makhzénienne ; et je crois qu’il importe d’en bien préciser le caractère, au moment où le Maroc va sortir de son isolement antérieur, pour se rattacher plus étroitement à l’empire français du Nord-Ouest africain. Je voudrais donc faire l’étude de la collectivité bizarre qui domine l’anarchie marocaine, afin de montrer la façon dont le pouvoir central est exercé par le makhzen en face de l’éparpillement des tribus. Les renseignemens historiques ont été puisés dans les ouvrages des annalistes marocains, notamment dans le Nozhet-Elhadi, l’Ettordjeman, et l’Istiqsa ; les indications relatives à l’organisation et à l’activité du makhzen, m’ont été fournies avec beaucoup de complaisance par des personnages autorisés.


I

Dans son fonctionnement actuel, le makhzen est une création moderne. Toutefois, dès que le Maroc parvint à dégager son