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des malaises pendant les fêtes de l’Exposition ; il urinait du sang de temps à autre. En cas de malheur, personne ne semblait à l’Impératrice de force à suppléer Rouher. Une partie des amis de l’Empire, mécontens des défaillances du souverain et effrayés de son affaiblissement, dissimulaient à peine qu’une abdication s’imposerait, peut-être à un moment prochain, comme une nécessité d’État. Ceux-là, non moins que l’Impératrice, croyaient Rouher l’homme indispensable d’une telle crise. Or, à ce moment, l’appui de la souveraine était beaucoup plus eflicace que celui de son époux. Elle n’était plus la jeune femme brillante, éprise de plaisirs, tout entière au bonheur de vivre au milieu des hommages : c’était une femme sérieuse, expérimentée, ayant le goût des affaires, l’aptitude à les comprendre et à se les assimiler, l’éloquence pour les exposer et les débattre, et, tandis que l’Empereur se montrait de plus en plus réduit à n’avoir que des velléités, ou plutôt des volontés intermittentes, elle était en possession d’une volonté forte. Ainsi le vice-empereur n’avait à redouter aucune résistance sérieuse dans l’exercice de l’immense pouvoir que l’Empereur venait de lui confirmer.


EMILE OLLIVIER.