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LE
RETOUR DE VARENNES
JUIN 1791

III[1]
LA RENTRÉE

Le temps était superbe, la route semblait, pour ainsi dire vivante ; dans tous les villages, dans toutes les fermes isolées, on savait, maintenant, la fuite et l’arrestation du Roi. C’était, sur le pavé, de poste en poste, un incessant va-et-vient de courriers, d’estafettes, de curieux ; les paysans, sur leurs seuils, regardaient : la voiture des commissaires de l’Assemblée, à chaque halte, était annoncée, attendue, entourée ; on saluait, on acclamait ; les palefreniers montraient du zèle, les postillons, joyeusement, sautaient en selle et se faisaient gloire de mener à grande allure. A neuf heures du matin, les commissaires entraient à la Ferté-sous-Jouarre, — seize lieues de Paris, — passaient le pont de la Marne ; à l’entrée de la ville, leur voiture s’arrêta, la procession de la Fête-Dieu sortait de l’église ; ils mirent pied à terre, attendirent la fin du défilé, gagnèrent une auberge où, pendant qu’on changeait les chevaux, ils se firent servir à déjeuner. La municipalité de la ville vint les saluer : ils apprirent là que la famille royale avait passé la nuit à Châlons

  1. Voyez la Revue des 15 avril et 1er mai.