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sur mon comte, puisque je les ai en quelque sorte arrachées, mais songe que lamour justifie tout et pardonne tout, si tu maime donc ne fais plus de reproches à ton amant, regarde moi comme ton futur époux et travaille de ton coté a aplanir toutes les difficultés qui peuvent retarder notre union.

« il seroit sans doute facile de trouver dans un château de quoi meubler notre chaumière, mais on men offriroit tout le mobilier en présent que je nen accepterois rien, a cause de la mission dont je suis chargé, vous penserés comme moi vous qui sentes si bien.

«[1] je comtois partir demain avec le Citoyen Moreau et un de mes collègues, mais comme il en reste deux autres jai cru pour le bon exemple devoir rester le dernier, quoique ma mission soit apeuprès finie, je ne partirai donc que samedi a huit heures du matin par la messagerie et si vous sentes tout le prix que j’attache aux expressions de votre amour je recevrai encore une réponse a la présente avant mon départ.

« ce mercredi 8 may 1793 lan 2 de la république.

« je ne loge point au signe de la croix, mais au Cigne oiseau dont le plumage est aussi blanc que votre ame.

« ma lettre partant a minuit de chantilly doit vous être rendue jeudi après midi, en me repondant avant le lendemain onze heures, je recevrai la votre vendredy au soir.

« je vous embrasse de tout mon cœur. Je ferai tout mon possible pour aller vous demander a diner dimanche. »


Lettre no 20. — De Félicité Didot[2], — sans indication de lieu, ni de date, mais postérieure au 8 mai 1793, puisqu’il y est fait allusion à la lettre du 8 mai qui parle de « faveurs superficielles » et qui a été lue par Mme Didot ; — inédite.


« Je m’en étois bien douttée trop sensible Amant que la dernière page de ma lettre te causeroit du chagrin, aussi à peinne fut elle partie que jen ressentis moi même des Exprextions quelle contenoit, mais puisque trop de vivacité a servie à te faire connoitre, à quelle douleure mon Ame seroit emproie si tu prenois encore des douttes pour un si petit suget. quelle serve aussi à taprendre que lorsqu’on aime bien, les douttes sont des offences mortelles, je ne veux pas pour cela que tu me cache tes

  1. Ce dernier passage de la lettre semble avoir été écrit plus tard que le début de la missive.
  2. Cette lettre a le no 36 dans la collection Gelis-Didot.