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puissent et doivent comprendre la totalité des hommes en état de porter les armes, de manière à appuyer l’armée de première ligne ou bien à remplir ses vides, rien de plus juste ; mais il devrait y avoir une armée de première ligne, composée de soldats invincibles, pour répondre à l’avance politique de l’adversaire et pour encadrer nos réserves.

On est effrayé, quand on regarde de près la fragilité du système proposé et la difficulté d’en obtenir une armée solide : même en admettant un chiffre considérable de rengagés, et la distinction des combattans et des non-combattans, nos 300 000 hommes de l’intérieur ne pourraient guère encadrer utilement plus de 300 000 réservistes, tandis que nos 200 000 hommes de couverture, qui tiendraient d’avance au complet de guerre les unités de la frontière, seraient empêchés par cela même de servir de cadres, et ne pourraient recevoir plus de 100 000 réservistes régionaux, auxquels viendraient s’ajouter les territoriaux de la frontière.

Nous aurions donc une certaine peine à former une armée offensive solide, au chiffre total d’un million de combattans environ, qui aurait derrière elle les armées de seconde ligne, — et de valeur secondaire, — formées exclusivement de réservistes et prêtes à s’amalgamer dans l’armée de première ligne ou à l’appuyer. Mais, au moins, nous aurions une armée.

Notons que, dans cette hypothèse, les armées de deuxième ligne ne seraient pas sensiblement inférieures aux formations qui résulteront du projet de loi actuel, chez lesquelles l’élément actif sera inévitablement noyé dans l’élément réserviste. En revanche, elles emprunteraient une force inappréciable au voisinage de l’armée de première ligne. Si donc on ne veut pas remettre le sort du pays aux mains d’une cohue de deux ou trois millions d’hommes sans esprit et sans force militaire, on ne saurait trop apporter d’attention à cette question si négligée.

Quant aux groupemens territoriaux, ils garderaient la même valeur dans les deux systèmes.

On instruirait ainsi le plus grand nombre possible de véritables soldats aux moindres frais, et nous pourrions espérer obtenir cette force offensive d’environ un million d’hommes qui nous est indispensable.

Malheureusement, cela n’était déjà pas possible avec l’ancien système et le paraît encore moins avec celui que l’on propose. Ce chiffre de 504 000 hommes va comprendre toutes les non-valeurs ;