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moins d’un jour de marche de chaque garnison, il mette à notre disposition les mêmes forces.

Elles doivent donc compter en chiffres ronds au moins 200 000 hommes destinés à être complétés par 100 000 réservistes locaux. Nous ne pouvons faire entrer en ligne de compte les territoriaux de la région que la mobilisation pourrait jeter dans les forteresses de la frontière. Ces troupes seraient, par leur destination même, immobilisées et répondent à un autre côté de la question. Il faut, en revanche, défalquer de ce chiffre de 100 000 hommes le nombre considérable de non-combattans nécessaires à ces troupes pour pouvoir être immédiatement mobilisables.

En tous cas, et sans que nous puissions insister sur l’utilité des fortifications de Nancy et sur la révision de notre système de défense, il est un point sur lequel nous devons immédiatement attirer l’attention : c’est la méthode nécessaire pour porter dès le temps de paix nos unités de la frontière au nombre qui leur permettra d’atteindre avec les seuls réservistes de la région le complet de guerre, parce que cette question présente une corrélation directe avec la loi de recrutement, et doit exercer sur elle une influence décisive.

Cela n’est possible que de deux manières :

Soit prévoir pour ces corps un certain nombre de rengagemens, ou même un plus grand nombre de rengagés qu’ailleurs, soit leur attribuer délibérément un effectif du temps de paix plus élevé que celui des corps de troupes de l’intérieur. Cette dernière manière de procéder a d’ailleurs, comme inconvénient évident, « de découvrir saint Pierre pour couvrir saint Paul, » comme dit le proverbe populaire. C’est, en effet, avantager les unités de la frontière au détriment des autres ; c’est aussi prélever, sur les effectifs des unités de l’intérieur, les élémens qui leur sont indispensables. Et, lorsqu’on utilise ce moyen, il suffit que le quart de nos unités soit groupé dès le temps de paix le long de la frontière pour que la valeur de toute notre mobilisation en soit amoindrie. Le premier système paraît donc préférable, et le projet de loi ne paraît pas s’en être préoccupé. En tout cas, il n’apparaît point qu’il ait prévu les rengagés qui pourraient limiter ou remplacer cet emprunt aux unités de l’intérieur.

Passons à l’armée proprement dite : le manque de prévisions