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une diminution des naissances correspondent inévitablement une diminution des contingens et, aussitôt après, une crise des effectifs.

Au bout de vingt ans, la courbe des contingens reproduit sensiblement, en effet, le dessin de la courbe des naissances. Il est donc à prévoir que le nombre total des jeunes gens de vingt ans, — qui s’élevait, en 1879, à 316 000 en chiffres ronds, correspondant, pour la naissance, à l’année 1859, précédemment citée, — sera diminué dans la même proportion que le fut le nombre des naissances en quarante ans, c’est-à-dire d’un cinquième ; et que le nombre des jeunes gens de vingt ans, en 1919, ne sera, par conséquent, que de 250 000 environ.

Il y a là matière aux plus sérieuses réflexions ; surtout si l’on songe, qu’à la même époque, en 1919, l’Allemagne pourra enregistrer un nombre d’hommes de vingt ans très supérieur au nôtre. Et cela s’annonce déjà comme inévitable ; car les hommes dont il s’agit ne sont pas à naître, ils sont déjà nés. Mais ce qui n’est pas inévitable, c’est que cette différence, en faveur de la race germanique, soit aussi irrémédiable qu’elle le paraît tout d’abord. La gravité peut en être atténuée, si nous savons faire de notre contingent annuel un usage meilleur que les Allemands ne font du leur.

La chose, il est vrai, n’est pas facile. Il apparaît en effet que les Allemands tirent un meilleur parti de leurs immenses ressources en hommes, étant plus ménagers que nous, à la fois des intérêts militaires et des exigences sociales. Mais nous pourrions faire aussi bien, peut-être un peu mieux. En tout cas, nous devons faire l’impossible pour que, de la baisse des naissances, de la diminution du contingent, il ne résulte pas cette crise des effectifs si redoutée par le rapporteur du budget de la Guerre en 1901, et qui reste aujourd’hui le péril de l’organisation nouvelle.

« Il faut prévoir dès aujourd’hui, disait-il avec chiffres à l’appui, l’époque peu lointaine où la loi de 1889 cessera de nous procurer les effectifs nécessaires pour l’entretien de l’armée sur le même pied qu’aujourd’hui, puisque cet effectif de 573 000 hommes correspond à un contingent annuel de 210 000 hommes et que les contingens avenir tendront à tomber, à partir de 1911, au-dessous de 190 000 hommes. »

À ce moment donc, le déficit sera de 50 000 hommes, et, si la