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du droit commun à tous les régnicoles. Cette force que représente le « sémitisme » s’est, en ces dernières années, par suite de diverses circonstances de la vie politique, presque toujours trouvée en combinaison avec le socialisme internationaliste. La Russie est, aujourd’hui, l’ennemi contre lequel, dans l’univers entier, elle organise la lutte et dirige ses coups. Nous ne parlons pas, bien entendu, des Israélites en tant qu’individus, — beaucoup, notamment en France, font des vœux pour la cause de la Russie, — mais seulement en tant qu’ils représentent des intérêts de race soutenus par une formidable puissance financière internationale. Si l’on réfléchit à tout ce que représente aujourd’hui de puissance effective la force de l’argent, qui dispose de la presse et, par elle, de l’opinion, et qui fournit des armes aux partis révolutionnaires internationaux dans leur croisade contre la Russie des tsars, l’on ne doutera pas qu’il n’y ait là, pour l’empire moscovite, un danger d’autant plus redoutable que, victorieux ou vaincu, il peut le rencontrer devant lui, dissimulé sous divers déguisemens diplomatiques, lors du règlement de compte général qui mettra fin à la guerre actuelle. Contre cette coalition de toutes les forces internationales et révolutionnaires, ce ne sera pas trop, pour la Russie, du prestige de grands succès militaires et de toutes les ressources de sa diplomatie et de ses alliances.


II

Nous avons montré comment « l’Eglise de la Révolution[1], » sans hésiter, dès les premières heures de la guerre, s’est, par l’organe de ses journaux et de ses pontifes, rangée sous les drapeaux des Nippons ; elle ne s’est pas contentée d’exprimer des vœux platoniques pour le succès de leurs armes, mais elle leur a apporté un utile concours en travaillant à ameuter la presse et l’opinion contre le « tsar knouteur » et en poussant les gouvernemens à favoriser le Japon, soit par une neutralité bienveillante, soit même par une aide effective. Pour faire contrepoids à cette coalition de forces internationales nettement hostiles à la Russie, aucune puissance équivalente ne se dresse au-dessus des

  1. L’expression est de Michelet : « Elle (la Révolution) n’adopta aucune Église... Pourquoi ? C’est qu’elle était une Église elle-même. » Histoire de la Révolution française. Préface de 1868, I, p. 11.