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La palette de bois s’abat, et tu te penches.
Ton bras monte, un côté de ta gorge le suit,
Et dans ce mouvement ta chemise sans manches
Découvre l’aisselle qui luit.

Un rayon de soleil mystérieux se traîne
Sous le feuillage où flotte un tendre clair-obscur.
Les toiles que tes mains trempent dans la fontaine
Semblent ruisselantes d’azur.

Et moi, le front soumis à l’immense lumière,
J’assiste, avec un plein transport de volupté,
Aux gestes que tu fais dans l’ombre, lavandière
Ignorante de ta beauté.


XII


Donc tu vas, hors des lieux où t’enchaînait le doute,
Dans les chemins du jour,
Ayant avec la Foi pour compagnons de route
Le Travail et l’Amour.

Soit ! Dès l’abord pourtant de ces pentes sublimes,
Veille à n’oublier pas
Que le devoir de ceux qui marchent vers les cimes
Grandit à chaque pas.

Monte, suis ton dessein, n’accorde aucun relâche
A l’effort qu’il prescrit,
Accrois par la vertu d’une incessante tâche
Ton cœur et ton esprit ;

Et, quand tu laisseras ton regard se répandre
Sur les sommets atteints,
Que ce soit pour n’y voir qu’un degré d’où prétendre
A de plus hauts destins.