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par une loi l’autorisation spéciale par décret rendu après avis du Conseil supérieur de l’Instruction publique.

La discussion générale s’ouvrit le 5 novembre 1903. Deux orateurs occupèrent la séance : M. Charles Dupuy, qui accordait la liberté à des conditions modérées, et M. Béraud, l’auteur du projet qui, par le fait, maintenait le monopole : le premier traitant l’enseignement libre en émule, en auxiliaire ; le second, en ennemi. Dans la séance suivante (6 novembre), les opinions se rangèrent sous ces deux bannières : MM. Maxime Lecomte et Lintilhac dans le sens de M. Béraud, M. Vidal de Saint-Urbain dans celui de M. Charles Dupuy. Le ministre de l’Instruction publique, M. Chaumié, se prononça nettement pour la liberté contre le monopole. Le rapporteur de la commission, M. Thézard, n’était guère pour la liberté : il était surtout contre les congrégations ; il le prouva par un grand discours qu’il prononça dans la séance du 10 novembre, mais il eut un vigoureux adversaire dans M. Ponthier de Chamaillard, qui reprit la défense de la liberté, avec MM. de Marcère et de Blois. Nul n’était plus que le comte de Blois qualifié pour défendre l’œuvre de M. de Falloux. Au moment où la discussion générale allait finir, un sénateur du Nord, qui a toute l’ardeur des hommes du Midi, se précipita à la tribune ; il y apportait un contre-projet qui surpassait de beaucoup tout ce qu’on avait proposé jusque-là. Il s’étonnait du calme que l’on gardait ; on ne voit donc pas le péril : « Il a suffi à cette abominable loi Falloux de cinquante ans pour creuser un abîme entre les citoyens, pour opposer face à face deux clans, pis que cela, deux races, etc. » — Qu’est-ce donc ? Quel remède apporte-t-il par son contre-projet ? — Il va le dire :

« Adopter dans son intégrité le projet de loi présenté au nom du gouvernement, sous l’unique modification ci-après : Article premier. Remplacer le texte « c) La déclaration qu’il n’appartient pas à une congrégation non autorisée, » par cet autre texte « c). La déclaration qu’il n’a point prononcé de vœux d’obéissance ou de célibat. »

Les questions se pressent :

« Est-ce que l’interdiction d’enseigner s’appliquera aux prêtres séculiers ? » — « Absolument. » Et, se reprenant : « Elle ne s’applique pas aux prêtres séculiers en tant que prêtres, mais elle s’applique à ceux qui auront prêté le vœu d’obéissance ou de célibat. Si les prêtres séculiers n’ont pas prêté ces vœux, ils pourront enseigner ; sinon, non. »

Le président coupe court à ces questions et à ces réponses en disant que le prétendu contre-projet est un amendement et qu’il sera discuté en son lieu. M. Clemenceau insiste pourtant pour que l’on ait