Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 20.djvu/600

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

correspondans. Vous m’enverriez tous les quinze jours un article sur une question, soit politique, soit militaire ou scientifique. Vous pourriez aussi faire faire à Genève, par des personnes distinguées, des articles que vous m’enverriez. Je donnerais cent francs pour un bon article. Je désire surtout que les personnes que vous emploierez à ce travail mettent dans leurs écrits plus d’idées que de mots, car je déteste le style diffus. Vous voyez, d’après ce que je vous dis, que ce journal traitera des questions non seulement politiques, mais aussi des questions de littérature, d’histoire et d’art militaire.

J’ai encore, mon cher colonel, un autre service à vous demander. Je voudrais avoir près de moi, comme secrétaire, un jeune homme d’un caractère sûr, qui eût de bonnes manières et qui sût parfaitement sa langue. Peut-être pourriez-vous le trouver à Genève. Vous me feriez bien plaisir de le chercher.

Vous voyez, mon cher colonel, que j’use bien de mes amis. »


Trois mois plus tard, les projets de Louis-Napoléon se sont modifiés. De Londres, où il est encore le 17 avril, il s’excuse de la peine inutile qu’il a donnée à Dufour.


« Ne m’accusez pas, dit-il, de légèreté, ma position m’oblige souvent à changer complètement mes plans. Ainsi, par exemple, j’ai abandonné le projet du journal hebdomadaire. Mais que je vous dise à ce sujet que je n’ai jamais songé à en être officiellement le rédacteur. J’en aurais été le directeur, comme par exemple M. Molé passe pour être lame de la Revue des Deux Mondes.

Je ne cherche plus maintenant de secrétaire ; ainsi voilà encore une commission dont je vous demande pardon de vous avoir occupé. Je veux simplement maintenant augmenter un peu mon entourage. Si vous connaissiez, par hasard, un ancien militaire qui soit encore dans la force de l’âge, qui ait nos opinions, et qui consentît à venir tous les ans passer quelques mois avec moi, je vous autoriserais à l’engager à venir me voir. Je paierais son voyage et je lui ferais une pension de quatre à cinq mille francs.

Adieu, mon cher colonel. Je regrette bien souvent de ne pouvoir déposer dans le sein de l’amitié mes craintes, mes soucis, et mes espérances. Que n’êtes-vous plus près ? »


Au moment où il écrivait ces lignes, le prince mettait la dernière main à une nouvelle édition des Idées napoléoniennes, qui portait