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fixé pour quelque temps à Lewington, jolie petite ville à quatre-vingt-dix milles de Londres, où il y a une bonne société pendant l’hiver et où L’on chasse à courre, exercice qui m’a beaucoup plu, parce qu’il s’agit de franchir au galop tous les obstacles dont la campagne est entrecoupée, comme haies, fossés et barrières. Maintenant, je vais aller visiter les fabriques de Birmingham et de Manchester et je retournerai à Londres pour l’ouverture du Parlement, qui aura lieu le 5 février. Je resterai alors dans la capitale.

Tout le monde que j’ai vu ici a été très bien pour moi. Mais je regrette toujours notre bonne Suisse, où je me trouvais chez moi, tandis qu’ici, malgré toutes les prévenances et les distractions, je me trouve toujours étranger partout et, comme l’oiseau sur la branche, je suis constamment en l’air. L’idée de pouvoir un jour retourner en Suisse m’est bien douce. Mais, quand même le ministère changerait, je crois que, fût-ce dans un an, mon retour en Suisse éveillerait des craintes dans les cantons, qui me deviendraient peut-être défavorables. Quand vous m’écrirez, dites-moi dans quel état est l’opinion à mon sujet.

Je ne vous parle pas politique, les journaux vous montreront assez tout le gâchis constitutionnel et parlementaire de Paris. Au milieu de toutes ces mesquines passions et de ces honteuses disputes, il n’y a que notre gloire militaire qui reste pure et resplendissante toujours du même éclat.

Le colonel Vaudrey est avec moi depuis quelques jours ; il me charge, ainsi que Persigny et Conneau, de vous assurer de son attachement. »

Six mois plus tard, le 17 juillet 1839, à l’occasion d’un voyage projeté par le colonel Dufour, le prince lui écrit :

« L’idée de vous voir ici me sourirait beaucoup, et je voudrais bien que vous la missiez à exécution. J’aurais une chambre à vous offrir et je me ferais un grand bonheur de vous montrer tous les lions de Londres. »

Puis il le remercie pour une carte du canton de Thurgovie dont il lui a fait l’envoi.

« Elle me rappelle des lieux qui me sont bien chers et où je voudrais bien pouvoir me trouver. »