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encore toutes les rues, la municipalité avait à entretenir des réverbères à huile. La lampe coûtait, non compris la lanterne à poulie où elle était placée, 22 francs pour les appareils à becs plats avec double réflecteur, 40 francs pour les lampes à becs ronds Bordier avec double réflecteur. L’entretien et l’allumage coûtaient par jour, pour une moyenne de dix heures, sur la voie publique : les becs plats 25 centimes, pour la faible lumière de 16 dixièmes de carcel ; les becs ronds 47 centimes pour un peu moins d’un demi-carcel. Cet éclairage fallacieux fut un peu amélioré avec les lampes à pétrole, dont chaque bec coûtait, pour dix heures de fonctionnement, environ 46 centimes. L’intensité lumineuse était alors de huit dixièmes de carcel par appareil.

Actuellement la Ville de Paris dépense encore annuellement 40 500 francs pour l’éclairage à l’huile de la voie publique (215 lampes) et d’établissemens municipaux. Sur la voie publique, ce qui nous semble excessif, la dépense est de 20 000 francs de fourniture d’huile et de 12 000 francs d’entretien. Dans les édifices ou établissemens municipaux, la fourniture d’huile n’est que de 6 000 francs ; maison consacre encore 2 500 francs à l’entretien des appareils.

La dépense de consommation du pétrole, comme celle de l’huile de colza ou du gaz, dépend beaucoup de la grosseur et de la forme des brûleurs. Ainsi certaines lampes perfectionnées, admises à présent pour l’éclairage de luxe, qui consomment 85 grammes de pétrole à l’heure, fournissent une intensité de 3 carcels et demi, c’est-à-dire supérieure au pouvoir éclairant de quatre lampes des anciens modèles, mal odorantes, et consommant chacune 35 grammes de pétrole. On évalue à 450 000 hectolitres la quantité d’huile de pétrole et dérivés consommée chaque année par les Parisiens.

La mode règle presque toutes nos habitudes et l’éclairage a subi la mode. Tout d’abord, ni le pétrole ni le gaz n’étaient admis dans les appartemens aisés et élégans. Les salons, les salles à manger et les chambres à coucher des Parisiens ne connaissaient, avant 1870, que la lampe modérateur, à huile végétale, ou la bougie de stéarine. Petit à petit, le gaz a conquis droit de cité dans les cuisines, les couloirs, les antichambres ; avec l’incandescence il s’est finalement installé dans les salles à manger et même dans certains salons où l’on a, depuis une quinzaine d’années, admis également le pétrole grâce aux