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constitution des deux derniers pontifes. La France ne manqua point à son devoir, mais elle n’y mit point l’accent qu’on aurait attendu de la fille aînée de l’Eglise. M. Loubet n’envoya rien et M. Delcassé seul intervint : une fois de plus la place Beauvau gêna le quai d’Orsay.

Le Sacré-Collège ne reçut pas seulement des dépêches. Le 25 juillet, tout le Corps diplomatique accrédité auprès du, Saint-Siège vint lui présenter ses devoirs en grand uniforme, foule brillante et décorative qui défila devant les cardinaux en baisant la main à chacun, et qui les laissa tous éblouis de ses beaux costumes et charmés de sa courtoisie. Autrefois, c’était l’usage que chaque ambassadeur se présentât et parlât tout seul au nom de son souverain. Nous avons encore le beau discours que prononça Chateaubriand après la mort de Léon XII, et qui du reste n’eut aucun succès : c’était trop fort et trop coloré pour les cardinaux de 1828 !

Les allocutions correctes et bien tournées qu’échangèrent le cardinal Oreglia et M. d’Antas, le très sympathique doyen du corps diplomatique, n’avaient pas les défauts de celle de Chateaubriand.

Nos six cardinaux arrivèrent pour les dernières congrégations générales. Ils furent accueillis par leurs collègues avec beaucoup d’empressement et de vénération affectueuse. Deux avaient montré un vrai courage en se mettant en chemin : le cardinal Coullié, dont la santé était très précaire, et le cardinal Langénieux, qui relevait d’une grave maladie. Quant au cardinal Richard, qui fut le doyen d’âge du Conclave, il avait supporté vaillamment les fatigues de la route, ayant l’habitude de se guérir de ses indispositions par un voyage à Rome. M. Delcassé avait témoigné le désir de les voir tous avant leur départ. Quatre répondirent à l’invitation et se félicitèrent de son accueil. Il leur dit qu’il comptait sur leur patriotisme connu pour nommer un pape d’idées modérées et de sentimens favorables à la France. Avec une finesse tout italienne, il évita de prononcer un nom propre, mais il fut compris. A Rome, nos compatriotes ne songèrent point à punir la France des violences de M. Combes. Ils se souvinrent qu’il y a une ambassade qui n’en est point responsable et qui représente dignement nos vieilles traditions. Ils rendirent visite à l’ambassadeur et acceptèrent à déjeuner chez lui. Avec le cardinal Mathieu, ils étaient au nombre de sept. Dès qu’ils se