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malade sont graves, attendu son âge, sans être alarmantes pour le moment. »

Je me rends au Vatican vers neuf heures du soir et, en entrant dans la salle des gardes suisses, je croise un long cortège qui se dirige vers l’escalier. Je demande au cardinal Rampolla ce qu’il y a, et il me répond : « Nous allons chercher le saint viatique à la chapelle Pauline. » J’attends un quart d’heure, un bruit de sonnette retentit, les Suisses présentent les armes et le cortège reparaît très solennel et très triste, se dirigeant, à travers les grandes salles éclairées, vers la chambre du Pape. Il se compose des employés du Vatican, des scopalori, des camériers laïques et ecclésiastiques, de nombreux prélats et de cardinaux, tous tenant à la main des cierges allumés et précédant Mgr Pifferi qui porte le Saint-Sacrement. Un petit nombre seulement pénètre auprès du malade, qui est couché, très pâle et très faible, sur un modeste lit de fer. Le ciboire est déposé sur une table, le majordome lit la profession de Pie IV, puis récite le Confiteor. Le Pape mêle sa voix aux prières et prononce très nettement le mea culpa et le Domine, non sum dignus, puis il communie. Les cardinaux, dont le plus grand nombre était resté dans l’antichambre, entrent alors et passent tous devant le malade auquel ils baisent la main en l’assurant de leurs prières et des vœux qu’ils forment pour sa guérison. Il répond à peine, mais on l’entend pourtant dire au cardinal Ferrata : « Nous allons vers l’éternité, Ci avviamo all’ eternità. »

Hier, il y avait du mieux, mais, le soir, les médecins ont découvert un point pleurétique qui leur a donné de grandes inquiétudes, et l’on a jugé que le moment était venu de conférer l’Extrême-Onction au malade. Son confesseur, Mgr Pifferi, le lui a proposé. Il a consenti sans difficulté et a reçu le sacrement avec une grande piété, se prêtant à tous les mouvemens nécessaires, présentant ses mains aux onctions et répondant aux prières. Quatre personnes seulement assistaient à la cérémonie : Mgr Pifferi, le docteur Lapponi, Mgr Angeli et Centra. Aujourd’hui, le docteur Mazzoni a fait au-dessous du poumon droit une ponction qui a tiré huit cents grammes de liquide, et beaucoup soulagé le Saint-Père.


Jeudi 9. — Malgré ce soulagement, la faiblesse persiste et devient de plus en plus inquiétante. Le liquide pleurétique s’est