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même en Europe, mais alors, sur les points où les actions décisives se passent, elle ne peut pas entrer dans les calculs.

« Toutefois prenons leçon sur elle en ce qui concerne la mobilité que nous devons rechercher pour toutes les armes, et qui est indispensable pour les opérations actives. Nous devons surtout compter sur cette mobilité pour augmenter notre force. »

On le voit : les considérations du général von der Goltz ne font que confirmer les principes de notre règlement de 1875. Elles prononcent la condamnation des attaques dites décisives.

Les Anglais, de leur côté, sont allés plus loin encore dans les voies nouvelles.

Les grandes manœuvres de 1903, dirigées par le feld-maréchal lord Roberts, ont été particulièrement intéressantes. Elles ont mis aux prises, dans les environs de Salisbury, le 1er corps d’armée, fort de 17 000 hommes, sous les ordres du général French, et le 2e corps d’armée, d’un effectif de 14 000 hommes, sous les ordres du maréchal Wood.

L’examen sommaire des opérations du 14 au 17 septembre permet de se rendre compte des idées qui ont cours, en ce moment, dans les hautes sphères du commandement anglais.

Le 14 septembre, le maréchal Wood tient ses troupes réunies. Il se porte au-devant de son adversaire, qui, par suite de dispositions antérieures imposées, est formé en deux groupes.

L’un d’eux, commandé par le général Bruce Hamilton, est à une distance telle que le maréchal Wood pourrait, en le retardant, se jeter avec une forte supériorité numérique sur l’autre, commandé par le général French.

Dès le premier jour, il est facile de constater que la cavalerie des deux partis n’est nullement employée d’après les idées qui ont actuellement cours sur le continent. Il ne lui est demandé aucun des renseignemens qu’elle pourrait obtenir par la vue. Il est en effet admis que la cavalerie, arrêtée par des coups de fusil venant d’un ennemi invisible, ne peut plus renseigner par les mêmes moyens que par le passé. Ce n’est que par le combat à pied qu’elle peut déchirer les rideaux dont s’enveloppe l’adversaire et éclairer la situation.

Une rivière, la Lambourn, barre la direction de marche du maréchal Wood. Celui-ci, aussitôt qu’il le peut, en fait occuper