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« Des troupes massées en colonne ou en ligne pleine ne sauraient plus, sous le feu, manœuvrer, combattre, ni même se tenir en position, à moins qu’une configuration avantageuse du terrain ne compense les inconvéniens d’une disposition devenue trop vulnérable. Ces formations offrent au tir de l’adversaire des buts trop étendus ; elles ne permettent pas aux armes actuelles de produire tout leur effet utile ; elles n’ont pas une mobilité suffisante, ni assez de souplesse et d’élasticité pour qu’on puisse utiliser tous les couverts du terrain.

« Dans ces conditions, elles ne présentent même plus, en raison des effets destructeurs du feu, les garanties de solidité ni les ressources qu’elles offraient jadis pour maintenir la cohésion et faciliter au chef la direction de la troupe.

« Ces précieux avantages, plus indispensables que jamais, devront donc être recherchés aujourd’hui, à portée du tir ennemi, dans des formations autres que celles de l’ordre serré, ce dernier étant d’ailleurs conservé partout où une nécessité réelle n’obligera point à l’abandonner. »

Ne pourrait-on croire que ces lignes ont été écrites au lendemain de la guerre sud-africaine ? Elles datent cependant de vingt-huit ans.

On était en droit de croire que, la doctrine ayant été fixée dans de telles conditions, rien ne serait plus facile que de suivre la voie tracée et de perfectionner l’instruction d’après les nécessités que créeraient les nouveaux engins de destruction.

Ce fut le contraire qui se produisit. On revint bientôt en arrière.

Maintenant que les événemens de la guerre sud-africaine viennent de remettre eu lumière ces principes directeurs et démontrer leur formelle vérité, les doctrinaires coalisés se refusent à l’évidence et se cramponnent à leur enseignement suranné.

Ce fait peut paraître si extraordinaire que, pour éviter toute discussion, il est nécessaire de citer des textes.

Le projet de règlement sur l’exercice et les manœuvres de l’infanterie, de 1901, en ce moment en essai, s’exprime ainsi : Titre V. — Art. 52. « — Les troupes de choc s’approchent progressivement et sont placées face à l’objectif choisi. Chacun de leurs bataillons est disposé sur une ou deux lignes, les compagnies en lignes déployées ou lignes de sections par quatre, ou en colonnes de compagnie séparées par les intervalles et les distances qui conviennent le mieux aux circonstances...