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empire. Honolulu, dans les îles Hawaï, qu’ils ont annexées en 1898 et dont ils ont fait un « territoire » de l’Union, est à 2 080 milles anglais de San Francisco ; c’est le port de relâche obligatoire pour tous les navires qui, d’Australasie ou de Chine, gagnent les ports des États-Unis ou de la Colombie britannique. Jouissant d’un climat délicieux et sain, mais souvent secouées par des convulsions volcaniques, les îles ont une population bigarrée, mélange étrange de Polynésiens, de Portugais, d’Américains, de nègres émigrés des États-Unis, de Chinois qui y accaparent les petits métiers, et enfin de 40 000 Japonais, imposante colonie, dont l’importance avait fait naître, dans l’empire nippon, des projets d’annexion auxquels l’intervention américaine est venue brusquement couper court[1].

Sur la route de Sydney et d’Auckland, les îles Samoa occupent une excellente position stratégique : elles commandent les communications entre l’Amérique anglaise et l’Australasie, de même qu’entre nos colonies de la Nouvelle-Calédonie et de Tahiti. L’archipel était, jusqu’en 1899, indépendant sous la triple garantie de l’Angleterre, de l’Allemagne et des États-Unis ; un traité de partage attribua, à cette date, aux Américains les îles de Pango-Pango et de Tutuila ; plus petites que les îles allemandes, Savaii et Upolu, elles ont l’avantage d’abriter le meilleur mouillage du Pacifique.

Honolulu, Pango-Pango et Guam, dans les Mariannes, sont surtout des points de relâche au milieu du Pacifique. Les Philippines constituent, au contraire, une magnifique colonie. Arrivés dans l’archipel sans autre objet que de détruire la flotte espagnole, les Américains furent entraînés par leur victoire même à s’y substituer aux vaincus ; ils y ont trouvé une population insoumise, radicalement inapte à s’adapter aux mœurs de ses nouveaux maîtres, et ils se sont heurtés à des résistances meurtrières. Aujourd’hui encore, leur établissement aux Philippines n’est pas beaucoup plus solide que ne l’était celui des Espagnols. Les commerçans yankees ont cependant réussi à augmenter leurs affaires, aux dépens des maisons anglaises installées depuis longtemps dans les îles et qui luttaient déjà avec peine contre la concurrence allemande. Le gouvernement n’a pas établi de tarifs de faveur pour ses nationaux, mais, au moyen d’un

  1. L’archipel produit surtout du sucre (200 000 tonnes par an) qu’il envoie à San Francisco.