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POÉSIE

BOIS SACRES


I


Lorsque la foi païenne occupait l’âme antique,
La Grèce et l’Italie avaient leurs bois sacrés ;
Les nôtres sont les bois de ce château rustique,
Témoins, pieux aussi, de nos jours vénérés.

C’est là, dans leurs sentiers, là, sous ces mêmes branches,
Que nous avons passé, plus jeunes, moins pensifs ;
Celle qui nous quitta, l’aïeule aux mèches blanches,
Savait le nombre d’ans que comptaient les vieux ifs.

Sur les piliers carrés où se scelle la grille
Les deux lions de pierre érigent leur fierté ;
L’or léger des tilleuls tout autour s’éparpille
Comme jadis, aux jours déclinans de l’été.

O toi ! mon cher amour et ma dernière muse.
Ma force consolante aux jours de trahison.
Si nous sommes vaincus par le nombre et la ruse,
Viens nous réfugier dans la chère maison.