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monde le 16 juillet de l’année suivante, qui fut inscrite le même jour à l’état civil de Paris sous les noms de ses père et mère. Mlle Garat resta aux mains de son père, qui avait voulu se charger de son éducation, ce qui explique pourquoi il n’est à aucun degré question d’elle dans les papiers des dames de Bellegarde, comme si elles se fussent entièrement désintéressées de la nouvelle née, qui plus tard se maria et qui mourut en 1827. Toute leur sollicitude fut pour le fils.

Au moment de sa naissance, résolues à ne plus résider en Savoie, elles venaient d’acheter le château de Chenoise en Seine-et-Marne, qui avait appartenu à leur cousin le comte d’Hervilly. A l’enfant sans nom, elles donnèrent celui du château. Il s’appela Louis de Chenoise. En outre, tante Aurore déclara qu’elle l’adoptait. Plus tard, en 1816, quand elle substitua à cette adoption de fait l’adoption légale qui devint définitive en 1826, elle put déclarer et prouver « qu’elle l’a adopté au moment de sa naissance, que ses père et mère lui ont remis leurs pouvoirs ; qu’elle l’a élevé, qu’il ne l’a jamais quittée, et que, sa tendresse s’augmentant avec l’âge et par les sentimens qu’il lui a voués, elle lui fait don de sa terre de Chenoise, qui lui appartient à elle en toute propriété par la liquidation de sa fortune avec sa sœur. »

Il ne faudrait pas conclure de cette déclaration de la tante que la mère lui a abandonné l’éducation de l’enfant. Les deux sœurs vivaient ensemble ; il était auprès d’elles et la tendresse vigilante de sa mère adoptive n’enleva rien à celle de sa mère naturelle. Il eut deux protectrices pour une. Tout démontre qu’il les aima également. C’est sous le nom de Louis de Chenoise qu’elles relevèrent, sans qu’il soit établi que le jeune de Genoude, qu’on retrouve plus tard parmi leurs amis[1], ait été son précepteur. Sous le même nom et à peine âgé de quinze ans, il s’engage en 1815 dans le corps de volontaires que le duc d’Angoulême conduit contre Bonaparte et entre dans l’armée en 1816, avec le rang de garde du corps surnuméraire, compagnie de Luxembourg ; appelé à l’activité en 1820, il est attaché tour à tour comme lieutenant au 5e hussards en 1825, au 1er régiment de

  1. On lit au bas d’un acte de notoriété en date du 21 juillet 1826, parmi les signatures des témoins, celle de Antoine-Eugène de Genoude, maître des requêtes au Conseil d’État.