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et ceux qu’on a cru devoir assujétir aux vingtièmes d’industrie sont obligés d’attendre leur sort d’une décision qui ne peut être rendue que sur des estimations incertaines… Que d’abus doivent naître d’une autorité arbitraire ! A combien de haines, de vengeances et de vexations de toutes espèces ne doit-elle pas donner lieu ! »

Ecoutons encore la Cour des aides sur la taille, dans ses remontrances du 9 juillet 1768 :


« La taille est généralement regardée comme le plus dur de tous les impôts ; le poids en est supporté par les citoyens les plus pauvres et les plus utiles : l’arbitraire y règne et on l’aggrave encore chaque jour, en feignant de vouloir le détruire ; la taille éteint toute émulation et toute industrie, parce que l’industrie est tantôt un motif, tantôt un prétexte d’augmentation de taxe. »

Encore la taille reposait-elle sur une base fixe et déterminée à son origine même. Le roi en arrêtait tous les ans le brevet, ou le montant, et cette somme totale à obtenir était ensuite répartie entre les généralités ; — puis, par les intendans, entre les paroisses de chaque généralité ; et c’était dans chacune des paroisses que les collecteurs et les commissaires des tailles évaluaient les revenus de chaque taillable. Combien leurs excès, leurs abus d’autorité n’eussent-ils pas été plus grands si rien ne les eût arrêtés, s’ils n’avaient pas trouvé une limite naturelle à leurs caprices dans celles mêmes de la somme fixe à recueillir ! Les collecteurs et les commissaires atténuaient les cotes pour eux et pour leurs amis, et les surélevaient pour les autres. » De laboureur à laboureur, avait dit Vauban, le plus fort accable le plus faible. » Combien ces dangers ne seraient-ils pas aggravés dans les systèmes actuels de l’impôt sur le revenu, qui ne serait plus un impôt de répartition comme la taille, mais un impôt de quotité permettant aux « commissaires » de ruiner leurs adversaires politiques !

C’est tout un volume qu’il faudrait écrire pour analyser les documens de ce genre. Je dois cependant en mentionner un dernier, dont le caractère est particulièrement significatif ; ce sont les « remontrances du Parlement au Roi sur les vingtièmes, arrêtées le… janvier 1778, et présentées au Roi le… du même mois » (le manuscrit des Archives nationales ne porte pas d’autre