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changeant le dixième en vingtième, les États de Bretagne et les États de Languedoc, notamment, s’étaient formellement opposés à ce que les agens de l’administration procédassent même aux évaluations nécessaires pour asseoir l’impôt. Mais écoutez, au sujet du même édit, la protestation qu’adressent au roi les « présidens et gens tenant sa cour de Parlement en Flandre. » L’adresse tout entière est à lire[1]. Elle établit d’abord la situation de la province ; ses coutumes ; combien la prospérité du commerce, de l’industrie et de l’agriculture y est ancienne ; quelles sont les mœurs, quel est le régime des impôts, et comment tout cela va être profondément troublé, ruiné par le système nouveau du vingtième et par l’obligation pour les contribuables de déclarer leur revenu. La protestation ajoute ensuite :


« Nos provinces doivent tout ce qu’elles sont au commerce et à l’agriculture et la levée du vingtième par déclaration détruirait l’un et l’autre.

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« Si l’on en vient là, Sire, c’en est fait de la Flandre ; le commerce fait subsister la moitié de ses habitans ; il faudra qu’ils cherchent à vivre ailleurs à mesure que le commerce cessera ou s’affaiblira.

« L’autre moitié, qui vit de la culture et des fruits de la terre, ne sera pas moins malheureuse, si la levée du vingtième par déclaration a lieu. L’agriculture est l’amie et la compagne inséparable du repos d’esprit et de la sécurité ; le laboureur n’est capable et ne peut être occupé que d’un objet ; tranquille sur tout le reste, il ne doit connoître et craindre que les vicissitudes des saisons ; l’embarras des affaires, l’inquiétude des procès sont pour lui plus terribles et plus ruineuses que la fureur des élémens.

« Ces malheurs seroient d’autant plus sensibles à nos habitans qu’ils les ont ignorés jusqu’icy ; les impositions de la campagne ont toujours été réelles en Flandre ; la répartition en est faite suivant d’anciens cahiers formés il y a plusieurs siècles ; chaque morceau de terre y est cotisé à une somme qui n’a jamais varié pour chaque centième ou vingtième. Le nombre de ces centièmes ou vingtièmes augmente ou diminue suivant les besoins

  1. Voyez Archives nationales, K. 894.