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manifestation de la force n’est jamais inutile parmi des populations qui ne s’inclinent que devant la fatalité ; non, encore, s’il était nécessaire et juste de châtier rudement le ksar de Zenaga qui fut toujours hostile à notre influence et rebelle à l’autorité du Sultan, et qui commit l’attentat du 31 mai contre le gouverneur général. Le bombardement de Figuig a certainement retenti dans toute l’Algérie et le Maroc ; il a montré, à ceux qui en auraient douté, les moyens d’action dont peut disposer la France ; il a été une manifestation qui produira, sur ceux mêmes qu’elle n’a pas atteints directement, l’impression salutaire que la France est une puissance à qui l’on ne saurait résister, mais qui est assez maîtresse d’elle-même pour limiter, de son plein gré, sa propre action dans les bornes fixées par les traités.

Nous ne voulons donc, ici, ni critiquer la mise en scène un peu théâtrale qui a encadré l’exécution de Figuig, ni relever ce qu’il y eut, dans toute cette canonnade et dans ces bulletins de victoire, d’un peu disproportionné peut-être avec l’objet poursuivi et le résultat obtenu. Mais si la pluie d’obus qui s’est abattue sur les ksour n’a pas été sans produire d’heureux effets, les événemens ont prouvé qu’elle n’avait pas résolu définitivement le problème de la sécurité du Sud-Oranais ; il n’est guère de semaine, depuis le bombardement, où l’on n’apprenne quelque surprise de sentinelle, quelque razzia d’animaux ou quelque attaque de convoi. — Où en est donc la « question de Figuig, » c’est, d’abord, ce que nous voudrions indiquer. Nous souhaiterions, en outre, pour ces quelques pages, une destination plus haute. Tout le bruit fait autour de Figuig, — bruit d’artillerie et bruit de presse, — a distrait l’attention du public français des affaires marocaines, dont se préoccupent toutes les grandes puissances et qui intéressent si gravement notre avenir dans la Méditerranée et en Afrique, pour l’amuser autour de ces oasis qui n’ont qu’une très médiocre valeur, de ces ksour qui ne sont que des bourgades et de ces petites bandes de pillards qui prennent, dans l’éloignement du désert, l’apparence d’armées en marche. A considérer, de Figuig, la question marocaine, on risque de n’en apercevoir que les aspects extérieurs et secondaires et d’en méconnaître l’importance intrinsèque.

Replacer, dans la série des problèmes qui intéressent l’avenir de la puissance française dans l’Afrique du Nord, la question de Figuig à son rang, montrer qu’on ne saurait ni l’étudier, ni