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britannique[1]. L’île de Socotora l’ut déclarée possession anglaise en 1886.

Tous ces petits sultans de l’Hadramaout ont bien gardé titre, cérémonial, simulacre d’indépendance, mais, pensionnés par la Grande-Bretagne, ils ne sont, en réalité, à l’heure actuelle, que ses humbles vassaux. Un nouvel accord avec la Turquie est venu tout récemment sanctionner cet état de choses. Le 20 mars 1903, un iradé du Sultan, mettant fin à des contestations de frontières entre l’Yémen et les possessions britanniques de l’Arabie méridionale, a reconnu à nouveau à l’Angleterre la possession des neuf petits États de l’Hadramaout, plus une bande de territoire de 2 kilomètres au sud de Moka, à laquelle, depuis longtemps, le gouvernement de l’Inde attache une grande importance, et a réglé le modus operandi pour l’hinterland d’Aden resté jusqu’alors en suspens.

Après ce dernier accord, si l’on veut résumer la situation acquise par la Grande-Bretagne depuis un siècle en Arabie, on peut dire que, sur toute la côte méridionale et toute la côte orientale d’Arabie, depuis la limite orientale du territoire de Cheïk-Saïd jusqu’aux approches du Chatt-el-Arab, la province turque de l’Hasa étant toutefois exceptée, l’Angleterre a acquis une position prépondérante, et que tout ce pays a accepté le protectorat officiel de l’Angleterre ou bien est placé sous son influence morale. Il y a lieu de faire ressortir ce résultat d’autant plus qu’il a été obtenu sans expédition militaire, sans dépenses, sans aucunes vexations ni tracasseries causées aux indigènes. C’est un des plus beaux triomphes qu’on puisse citer de la méthode d’expansion coloniale pacifique, méthode qui consiste à ménager souverains et peuples indigènes, à s’efforcer de gagner les bonnes grâces des premiers par des subsides et de s’assurer l’attachement des autres par des mesures d’ordre et de pacification, et qui donne tous les résultats de l’annexion sans les inconvéniens et les charges de la conquête. Nous allons voir quels avantages la Russie et l’Angleterre ont obtenus en appliquant la même méthode sur la rive orientale du golfe Persique, en Perse et au Béloutchistan.


ROUIRE.

  1. The Red Sea and Gulf of Aden, Pitot, 1900. ch. VIII, p. 353, édité par l’Amirauté britannique.