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persévérante confiance de la nation. Or, cette confiance ne saurait nous être conservée que par un exposé très franc, par une justification très complète de nos besoins.

C’est dans la faveur réfléchie d’une opinion publique dûment éclairée que nous devons chercher notre plus ferme appui et le premier fondement de notre force morale.


Arrivés ainsi à la fin de notre étude, reprenons, pour conclure, et résumons les enseignemens que nous y avons trouvés :

Partis de la constatation des difficultés et des dangers que présentent actuellement les manœuvres d’escadre traditionnelles, nous avons fait voir que ces dangers ne pouvaient que grandir, à cause de l’inévitable accroissement des tonnages, tandis que la conception la plus moderne de la tactique navale, dérivée du progrès des vitesses et de celui de l’armement offensif, rendait de moins en moins justifiée la recherche des formations compactes et des évolutions à rangs serrés.

Mais cette tactique de l’enveloppement, dont nous prouvions en passant la valeur par des exemples historiques, exige la mise en action d’unités nouvelles aussi et malheureusement assez différentes de celles qui prendront place, vers 1907, dans nos escadres de ligne. Nous avons essayé d’en préciser la physionomie, d’en définir le rôle, et de donner une idée d’un combat où se trouverait engagée une réunion de bâtimens répondant à notre idéal.

La vitesse du navire et la force de son artillerie ne nous paraissaient cependant pas les seules garanties de l’efficacité de la tactique en question. Nous sentions qu’à des unités destinées à agir, non pas isolément, certes, mais séparément (tout en combinant leurs efforts), nous devions donner une valeur individuelle spéciale ; que, par conséquent, de leurs équipages il fallait exiger, avec une instruction technique supérieure, une éducation militaire, une discipline de premier ordre, et l’assurance calme, au combat, qui résulte d’une pleine confiance dans les engins, les moyens et les chefs ; qu’aux officiers, quelle que fût leur origine, aux commandans d’unités, aux commandans de groupes, nous devions demander autre chose que la bravoure, que l’aptitude aux évolutions réglées, autre chose encore que la ferme contenance à son poste dans la ligne de bataille, et c’est : l’imagination qui fait concevoir les mouvemens décisifs, le coup