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d’abordage, la formation que le commandant en chef juge la plus convenable aux circonstances de la marche ou du combat.

Du temps des escadres à voiles, les évolutions étaient compliquées par la nécessité de composer avec les caprices du vent, énergie motrice extérieure au corps qu’elle animait. L’utilisation de forces asservies à nos volontés et la création d’un moteur intérieur devaient naturellement rendre les évolutions plus simples et plus sûres. Malheureusement, pour satisfaire à des considérations de l’ordre militaire qui paraissaient justes à cette époque et qui n’ont pas perdu toute leur valeur, on augmenta bientôt les dimensions et le déplacement des navires de combat, en même temps qu’on leur demandait une plus grande vitesse, pour la marche comme pour les mouvemens tactiques.

Alors que le plus lourd « trois-ponts » ne dépassait guère 5 000 tonnes, les premiers cuirassés en pesaient déjà 6 000, et leurs successeurs, qui montaient en trente années de 6 000 à 12 000 tonnes, s’élèvent aujourd’hui, d’un bond énorme et inquiétant, à 15 000, 16 000 et 18 000 tonneaux, nous affirme-t-on.

Progrès correspondans dans les dimensions : le Valmy de la guerre de Grimée (plus tard le Borda) mesurait une soixantaine de mètres. Le cuirassé Océan, quinze ans après, en avait déjà 90. La longueur du Gaulois et du Bouvet est de 120 mètres environ. Les unités de combat qu’on nous promet pour 1907 atteindront 130 mètres ; elles sont d’ailleurs distancées par les nouveaux croiseurs cuirassés qui vont jusqu’à 150 mètres.

Quant aux vitesses, la progression, pour être un peu moins rapide, n’en est pas moins fort sensible. Les vaisseaux à voiles, dans les circonstances les plus favorables, filaient une dizaine de milles à l’heure ; les vaisseaux en bois à vapeur, le Napoléon notamment, allaient à 12 milles, les frégates cuirassées du type Gloire à près de 14, les cuirassés d’il y a dix ans à 15 ou 16, tandis que ceux d’aujourd’hui donnent entre 18 et 19.

Et nous savons bien que ce ne sont pas là les vitesses d’évolutions ; qu’au demeurant, le commandant en chef reste maître de déterminer l’allure à laquelle il désire que soient exécutés les mouvemens tactiques (il y a cependant un minimum de vitesse qui résulte du plus petit nombre de tours d’hélice que peuvent donner les bâtimens) ; mais il n’est pas douteux non plus qu’il existe une liaison forcée entre les vitesses maxima de marche et les vitesses normales d’évolutions, et qu’à toute augmentation